30e anniversaire du droit à l'IVG : La barbarie et l'hypocrisie de la loi de 192002/12/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/12/une1896.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

30e anniversaire du droit à l'IVG : La barbarie et l'hypocrisie de la loi de 1920

Il n'est pas si loin le temps où, en France, chaque année des centaines de femmes mouraient et des milliers d'autres étaient mutilées à vie, simplement parce qu'elles avaient décidé de mettre fin à une grossesse non désirée. C'était le temps où, avant la loi Veil, les femmes vivaient sous le coup d'une législation barbare datant de 1920, qui les contraignait à avorter dans la clandestinité et donc, pour la majorité d'entre elles, dans les pires conditions sanitaires.

La loi de juillet 1920 contre "la provocation à l'avortement et la propagande anticonceptionnelle" infligeait des peines de six mois à deux ans de prison aux auteurs d'avortement. Elle avait été votée, moins de deux ans après le massacre mondial qui avait fait des millions de morts, par une Assemblée d'hommes plus attentifs aux arguments des va-t-en-guerre soucieux de repeupler la France qu'à ceux en faveur du droit et des libertés élémentaires des femmes. Du reste, les femmes n'eurent pas droit au chapitre. Elles n'avaient pas le droit de vote et encore moins celui d'être consultées pour un sujet où elles étaient pourtant les seules concernées.

Selon cette loi de 1920, l'avortement était un crime passible de la cour d'assises. En 1942, production de chair à canon oblige, l'avortement devint même un crime contre la sûreté de l'État, puni de la peine de mort! Et le 30 juillet 1943 Marie-Louise Giraud, accusée d'avoir aidé 26 femmes à avorter, était guillotinée au petit matin dans la cour de la prison de la Roquette...

Cette loi qui niait l'évidence -car rien ne peut empêcher une femme résolue à mettre fin à une grossesse non désirée d'arriver à ses fins- interdisait de plus toute information en faveur du contrôle des naissances. Même les conseils en faveur des méthodes dites "naturelles", basées sur les variations de la courbe de température au cours du cycle de la femme et dont on sait à quel point elles sont inefficaces étant donné le nombre de bébés nés sous leurs auspices, tombaient sous le coup de la législation. Seul le préservatif était un moyen d'y échapper car, comble de l'hypocrisie, il était considéré comme... un moyen de prévention contre les infections sexuellement transmissibles. Le préservatif n'était pas contraceptif, il était prophylactique!

Si la peine de mort pour avortement fut abrogée à la fin de la guerre, tout le reste de l'arsenal législatif persista jusqu'en 1974.

En 1967 toutefois, l'accès à la contraception fut libéralisé, avec la loi Neuwirth qui autorisait la fabrication des contraceptifs oraux et leur vente en pharmacie. En fait, seul l'article de la loi de 1920 concernant l'interdiction de la diffusion de la contraception fut alors suspendu. Toute publicité et même toute information à son sujet restait interdite. Mais il fallut attendre 1974 pour que la "pilule" soit remboursée par la Sécurité sociale et que les mineures puissent l'obtenir sans l'autorisation de leurs parents. Le remboursement de l'IVG, lui, ne fut voté qu'en 1982.

Mais là où l'hypocrisie le dispute au ridicule, c'est que l'article de la loi de 1920 concernant la publicité pour les préservatifs, en tant que moyen contraceptif, ne fut abrogé qu'en 1987 et qu'il fallut attendre 2001 pour que la propagande ou la publicité en faveur de l'IVG ne soient plus sanctionnées!

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