Saturnisme : L'attitude révoltante des pouvoirs publics03/11/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/11/une1892.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Saturnisme : L'attitude révoltante des pouvoirs publics

Dix ans après l'intoxication de quarante enfants par des peintures au plomb à Paris, leurs familles qui avaient porté plainte contre les pouvoirs publics devront attendre une nouvelle expertise pour savoir... si leurs enfants victimes de saturnisme seront indemnisés ou pas!

À l'époque, ces cas de saturnisme diagnostiqués par les services de l'enfance, avaient été signalés aux autorités sanitaires. En toute logique, l'État et la Ville de Paris auraient dû intervenir au plus vite, reloger les familles et soigner les enfants malades. Mais ils ont laissé traîner les choses en longueur.

Lasses d'attendre et soutenues par différentes associations, ces familles avaient saisi la commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) pour réclamer une indemnisation. Il y a deux ans, celle-ci avait jugé la plainte des familles recevable, arguant qu'il y avait bien une infraction et que les pouvoirs publics n'avaient pas porté secours aux familles concernées. Cela justifiait une indemnisation. Mais voilà, tout en retenant la mise en danger d'autrui, la cour d'appel de Paris a infirmé la décision de la CIVI et ordonné une nouvelle expertise afin de statuer sur la recevabilité des demandes d'indemnisation des victimes du saturnisme!

Dans cette affaire, tout le monde traîne la patte, cherchant à se défausser de ses responsabilités. Les pouvoirs publics se réfugient derrière le manque de logements pour justifier leur inertie depuis des années, comme s'il n'y avait pas assez de logements vides dans Paris? Les propriétaires empoisonneurs, qui empochent les loyers sans effectuer les moindres travaux, ne sont nullement inquiétés. Quant au Fonds de garantie, normalement chargé du versement des indemnisations aux victimes, il vient de faire appel du dernier jugement! Son avocat a déclaré: "Les médecins devront constater un déficit permanent sur le plan fonctionnel. Puis fixer une indemnité: combien vaut, par exemple, la perte de deux points de QI." Quel cynisme!

Or, tout le monde sait aujourd'hui que le plomb, même à faibles doses, "est à l'origine de dommages irréversibles sur le développement psychomoteur de l'enfant", comme le déclare une étude de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale. Cette maladie entraîne des "problèmes d'apprentissage, une diminution du quotient intellectuel et des troubles du comportement", ajoute l'avocat de l'Association des victimes du saturnisme, qui évalue le préjudice à 150000 euros par enfant.

Ces enfants sont issus de familles pauvres, pour la plupart immigrées, qui vivent depuis des années dans les taudis des XVIIIe et XIXe arrondissements de la capitale. L'attitude de l'État comme de la Mairie de Paris, ou du Fonds de garantie qui cherche à tout prix la faille juridique pour ne pas rembourser les victimes, de crainte que cela ne fasse jurisprudence (il y aurait 84000 enfants souffrant du saturnisme) est proprement scandaleuse et révoltante.

Reloger et indemniser toutes les familles et leurs enfants victimes de l'intoxication par des peintures au plomb devrait être une priorité des pouvoirs publics.

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