Ronal (Saint-Avold – Moselle) : Les travailleurs refusent d'être jetés comme des kleenex26/08/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/08/une1882.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Ronal (Saint-Avold – Moselle) : Les travailleurs refusent d'être jetés comme des kleenex

"180 familles sacrifiées pour le bénéfice", le slogan est resté affiché sur la façade de l'usine Ronal de Saint-Avold (Moselle) pendant des mois. Il résume l'état d'esprit des travailleurs de cette entreprise qui fabrique des jantes en aluminium pour l'automobile. Ouverte en 1976, la direction du groupe l'a artificiellement mise en dépôt de bilan et elle devrait être liquidée fin août.

Ronal est tout sauf une petite entreprise en difficulté. Filiale d'un groupe de 3000 salariés, l'identité de ses propriétaires est pour le moins opaque: une famille, des banques suisses... Les travailleurs n'ont toujours pas réussi, depuis mai dernier, à démêler quels sont les actionnaires. Les dirigeants du groupe ont choisi d'aller produire en Pologne: ils y bénéficient d'aides publiques, d'un allégement de charges pour... dix-sept ans, sans parler de salaires nettement moins élevés, dans une région sinistrée par la fermeture des mines de Silésie.

Les travailleurs et l'intersyndicale ont trouvé des notes du directeur expliquant que la mise en cessation de paiement de Ronal à Saint-Avold et une liquidation judiciaire présentaient l'avantage de ne rien coûter. On ferme ici en laissant le soin aux pouvoirs publics de payer la note et on ouvre en Pologne avec des aides publiques... c'est ça le capitalisme!

Les travailleurs ne l'entendent pas ainsi. Depuis mai, quelques dizaines d'entre eux (sur les 163 qui restent aujourd'hui inscrits à l'effectif) sont mobilisés avec l'intersyndicale pour refuser la fermeture organisée, obtenir des indemnités supérieures aux ridicules indemnités légales de 3500 euros par année d'ancienneté. Ils ont multiplié les actions, se rendant en Suisse, en Allemagne et même en Pologne pour s'adresser aux travailleurs des autres usines du groupe. Ils savent bien que les ouvriers de Pologne ou d'ailleurs ne sont pas leurs concurrents mais des exploités comme eux.

Parfois, l'accueil a été difficile: en Pologne, la direction avait fait appel à des vigiles armés empêchant tout contact, filmant les salariés polonais qui prenaient les tracts de ceux de Saint-Avold, et leur reprenant les tracts.

Depuis le 16 août, l'usine de Saint-Avold a rouvert ses portes: sans matières premières, sans commandes (c'est la direction du groupe qui les répartit entre les usines). Mais les travailleurs ne désarment pas et continuent à assurer une présence dans l'entreprise tout en multipliant les actions: le 18 août, ils ont manifesté en Allemagne avec le syndicat IGMetall; une journée "portes ouvertes" est prévue pour le 5 septembre.

L'écoeurement domine. Contre le patron qui a exploité les travailleurs de Saint-Avold pendant des années, usant la santé de bon nombre d'entre eux. Contre une justice qui, malgré toutes les preuves apportées, n'a fait qu'interpeler une seule journée le directeur.

La loi est pour les patrons et la porte pour les salariés.

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