Dans les collèges : - Régler les difficultés, ou aggraver la sélection sociale?30/06/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/07/une1874.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Dans les collèges : - Régler les difficultés, ou aggraver la sélection sociale?

Le gouvernement prévoyait d'instaurer des options "découverte professionnelle" dans les classes de troisième des collèges à la rentrée 2005. Son projet vient d'être rejeté au Conseil Supérieur de l'Éducation, organisme consultatif auquel participent les différentes fédérations syndicales d'enseignants et de parents d'élèves, qui ont voté contre ou se sont abstenues. En revanche, le Medef a voté pour.

Ces options "découvertes professionnelles" en troisième, de trois ou de six heures hebdomadaires, dont le contenu demeure flou, s'adressent de fait aux élèves en difficulté. Ces options se feraient au détriment d'options d'enseignement général, de langues en particulier. Il est prévu que les élèves choisissant l'option lourde de six heures puissent rejoindre des classes de troisième particulières, intégrées dans des lycées professionnels et donc rejetées des collèges. Les organisations de parents d'élèves et d'enseignants redoutent que ce projet contribue à augmenter la "ségrégation", la "préorientation", l'"éviction du collège" des élèves les plus en difficulté, comme l'indique un communiqué signé en particulier par la FCPE, la principale organisation de parents d'élèves. Et c'est bien de cela qu'il s'agit.

De nombreuses classes de collèges et de nombreux collégiens des quartiers populaires sont en difficulté. C'est là que l'on trouve la fraction des élèves les plus en difficulté, qui finissent par ne plus rien apprendre. Nombreux sont ceux qui sont entrés en sixième -ils seraient près de 15%- sans savoir véritablement ni lire et écrire ni compter. Dans ces conditions, la vie devient intenable pour les enseignants et les adultes. Cette situation fait du prétendu "collège unique" une fiction.

Mais au lieu d'attaquer à bras le corps cette situation, les gouvernements successifs ont cherché des palliatifs. Réduire l'enseignement général pour un certain nombre d'élèves n'est pas une innovation. Il existe actuellement des troisièmes d'insertion et des situations de formation en alternance. Mais avec les options "découverte professionnelle" que veut introduire le gouvernement, les organisations de parents et les syndicats d'enseignants redoutent un pas de plus dans cette direction et l'institutionnalisation d'une ségrégation.

D'autant que le gouvernement ne prévoit même pas les moyens adéquats pour assurer ces options ou ces classes de "découverte professionnelle". Supprimer une marginalisation, souvent commencée dès la sixième, de cette fraction d'élèves qui traînent de classe en classe supposerait bien plus de moyens humains, de locaux, donc des finances.

Avec des petits effectifs, en maternelle et en primaire, avec des groupes d'aide si nécessaire, bénéficiant de l'attention maximum d'éducateurs, il serait possible de réduire considérablement l'illettrisme à l'entrée en sixième. Des conditions similaires au collège, et des collèges de petites dimensions, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui, permettraient que l'ensemble des élèves bénéficient d'une formation initiale correcte de la sixième à la troisième. Les processus de "remédiation" que l'on nous concocte aujourd'hui pourraient alors être compris autrement que comme un moyen de se débarrasser des élèves les plus en difficulté.

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