Depuis le 28 mai dernier, les passagers aériens en provenance de l'Union européenne à destination des États-Unis (et du Canada) sont tenus de répondre à un questionnaire comptant 34 questions, notamment celle-ci: "Acceptez-vous le transfert de vos données personnelles vers les États-Unis?" Un refus de répondre annule l'embarquement.

Il y a dix-huit mois, la Commission européenne avait jugé le transfert de ces données "inacceptable". Depuis, prenant finalement en compte non plus les intérêts des passagers mais ceux des compagnies aériennes européennes, elle a enterré la hache de guerre et accepté 34 des 39 données demandées par les États-Unis.

Les passagers en provenance des 25 pays de l'Union sont donc tenus de se plier à des mesures que les États-Unis justifient évidemment par la nécessité de lutter contre le terrorisme. Un prétexte qui a le dos large, depuis le 11 septembre 2001, et qui justifie toutes les entorses aux libertés individuelles, pourtant théoriquement sacro-saintes outre-Atlantique.

Aux États-Unis, les pouvoirs publics veulent utiliser ces données pour accorder un code couleur à chaque passager, qui sera classé selon sa plus ou moins grande dangerosité, du passager sans problème (en vert) au passager dangereux, à n'embarquer sous aucun prétexte (en rouge, bien sûr).

La seule note rassurante dans cette information qui présage un fichage en règle des passagers à destination des États-Unis, et qui risque de générer des abus de toutes sortes, c'est qu'on nous dit par ailleurs que le système de fichage mis au point outre-Atlantique pour gérer toutes ces informations, avec l'assistance intéressée du marchand de canons Lockeed Martin, a pris du retard. Aux États-Unis aussi, les associations de défense des droits de l'homme et des parlementaires contestent. Du coup, la mise en service du système, d'abord annoncée pour la mi-2004, est reportée de mois en mois. Un petit sursis avant de se retrouver dans le "meilleur des mondes"?