"Réforme" de la Sécu : Les assureurs privés ont reçu des assurances...18/06/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/06/une1872.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

"Réforme" de la Sécu : Les assureurs privés ont reçu des assurances...

Gérard de La Martinière, président de la FFSA, la Fédération patronale des sociétés d'assurances, est ravi de la "réforme" de l'assurance-maladie que prépare le gouvernement. Avant même que Douste-Blazy n'ait présenté son projet en conseil des ministres, le 16 juin, il l'a applaudi des deux mains. Il a ainsi déclaré dans une interview au quotidien économique La Tribune, que "la réforme de la Sécu ouvre un champ de développement pour les assureurs". En effet.

Si la "réforme" passe, elle prévoit de faire entrer, ès-qualité, l'ensemble des sociétés d'assurances complémentaires -mutuelles et compagnies privées regroupées dans une "union"- dans la gestion de la Sécurité sociale. Cette union aura en effet la possibilité de peser sur la définition de la liste des risques à rembourser, ainsi que sur le montant des remboursements. "La mise en oeuvre (de la chose) ne sera pas très compliquée (...), nous avons confiance" poursuit de La Martinière.

Certes, le projet de Douste-Blazy ne définit pas noir sur blanc de quel "champ de développement" élargi vont bénéficier les assureurs, alors qu'ils réclament déjà depuis longtemps que la Sécurité sociale abandonne aux "complémentaires" la couverture des soins dentaires et d'optique, un secteur prometteur pour les assurances privées parce que fort mal remboursé par le régime général. Mais le président de la FFSA ne s'en inquiète pas outre mesure. "Il était plus opportun, a-t-il déclaré, de renvoyer ces discussions aux futures instances qui seront créées". Non seulement les assureurs privés seront représentés dans certaines d'entre elles, mais, poursuit-il, "des arbitrages devront être faits pour orienter l'utilisation (...) des prélèvements obligatoires vers les priorités de la politique de santé publique". Comme l'État veut nommer une sorte de super-directeur à la tête de la caisse d'assurance-maladie, que ce dernier aura un pouvoir de décision fort étendu et que la politique de l'État est de dessaisir toujours plus la Sécurité sociale au profit du secteur privé, les assureurs privés de la FFSA ne doutent pas un instant de ce que seront ces fameux "arbitrages", et de qui en bénéficiera.

En ce domaine, les assureurs privés n'ont guère de raison de se faire de souci quant à un éventuel changement de majorité. Pour ce qui est de l'actuelle, c'est de façon affichée qu'elle roule pour le patronat, auquel mille liens la rattachent (ainsi, le propre frère du ministre de l'Économie, Sarkozy, était encore tout récemment le "patron" des assureurs au Medef). Quant au Parti Socialiste, les mêmes assureurs privés savent comment, sous Jospin, la création de la CMU (couverture médicale universelle) dont se glorifiait le précédent gouvernement a, aussi, été un prétexte "social" à offrir aux assurances privées le financement public d'une "complémentaire" pour les plus démunis.

Mais, de toute façon, c'est la droite qui est actuellement aux commandes. C'est elle qui se charge, aujourd'hui, d'ouvrir un boulevard aux assureurs privés. Douste-Blazy a beau jurer ses grands dieux qu'une "privatisation de la Sécurité sociale se ferait sans (lui)" et que sa "réforme" est celle de "la dernière chance", les travailleurs et assurés sociaux le voient arriver avec ses gros sabots.

Alors que le patronat pille la Sécu de mille et une manières, le gouvernement invoque ce "trou" que l'État aide à creuser pour aider les assureurs privés à élargir leur domaine. Car c'est bien de cela qu'il s'agit: réserver de plus en plus à la Sécurité sociale les dépenses les plus lourdes (les assurés sociaux n'ayant plus qu'une couverture minimum se réduisant comme peau de chagrin), tandis que le reste ne serait plus couvert par le régime général. Ce reste, c'est ce qui fait saliver les compagnies privées. Car ce sont les risques qu'elles estiment les plus rentables, tels les soins dentaires, les appareillages auditifs, les lunettes -et la liste est loin d'être exhaustive-, ceux sur lesquels elles s'apprêtent à élargir leurs affaires avec l'argent des salariés, du moins de ceux qui arriveront encore, en se serrant la ceinture, à se payer des assurances-maladie privées.

Douste-Blazy peut bien mentir comme un arracheur de dents, il ne trompe pas grand-monde. Et ce n'est évidemment pas un hasard si le gouvernement a prévu de faire voter sa "réforme" en catimini, en plein été.

Raison de plus pour ne pas la laisser passer!

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