Extraits de l'allocution d'Arlette Laguiller, samedi 29 mai03/06/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/06/une-1870.gif.445x577_q85_box-0%2C16%2C161%2C224_crop_detail.png

Leur société

Extraits de l'allocution d'Arlette Laguiller, samedi 29 mai

Cette année, notre fête tombe, comme il est arrivé souvent, à quinze jours d'une élection. Il s'agit d'élire les députés français de ce Parlement européen censé représenter les 25 pays de l'Union européenne, 10 nouveaux pays, pour la plupart à l'est de l'Europe, y ayant été accueillis.

Nous participons à ces élections. Un courant comme le nôtre, qui a pour programme de défendre les intérêts politiques de la classe ouvrière et qui est le seul à le faire, doit être présent dans une telle campagne électorale. Nous militons tout au long de l'année pour défendre, face aux différents représentants des politiques bourgeoises, une politique pour la classe ouvrière. Nous ne pouvons pas, lors de ces élections européennes, laisser le terrain aux grands partis qui, au-delà de leurs différences, se placent tous, fondamentalement, sur le terrain de la défense des intérêts de la bourgeoisie.

Nous présentons des listes communes avec la Ligue Communiste Révolutionnaire. (...)

Ce que nous voulons, c'est avant tout dénoncer la situation qui est faite au monde du travail, à la fois par la politique du patronat mais aussi par les gouvernements qui se succèdent et dont les mesures accompagnent ou précèdent la volonté exprimée par le grand patronat de ce pays.

Le gouvernement en place, nommé par Chirac, appuyé par le score de 82% des voix obtenues à la présidentielle, est un des gouvernements les plus réactionnaires que nous ayons connus depuis longtemps.

Il y a deux ans, à l'élection présidentielle, toute la gauche gouvernementale, qui avait reçu une gifle politique au premier tour de l'élection, avait, entre les deux tours, présenté Chirac comme le sauveur de la démocratie face à la menace Le Pen. Le Pen n'avait pourtant aucune chance d'être élu président de la République. Mais, en revanche, sa politique a été reprise, sur bien des points, par Chirac-Raffarin. C'est un gouvernement de combat contre les classes populaires.

On n'en finirait pas d'énumérer toutes les mesures prises par ce gouvernement. (...)

Après le désaveu des élections régionales, le gouvernement est revenu sur quelques mesures et a dissimulé un peu le mépris cynique qui les accompagnait. (...)

Le langage est plus modéré aujourd'hui, mais personne ne peut se faire d'illusions. Une fois les élections passées, le gouvernement continuera et voudra intensifier le caractère rétrograde de sa politique contre les travailleurs.

Il le fera parce que tels sont les besoins et les voeux du grand patronat, et que le gouvernement n'est qu'un comité exécutif du grand patronat.

La nature du vote à ces élections européennes, quelle qu'elle soit, n'arrêtera pas l'offensive patronale. Pour arrêter cette offensive, il faudra bien plus que des bulletins de vote. Il faudra que les travailleurs reprennent le combat social. Il faudra qu'ils se servent de leur force collective, qui est considérable. Il faudra une lutte ample, des grèves larges, voire des grèves générales unissant l'ensemble des forces vives du monde du travail, par-delà les catégories, par-delà les corporations.

Il faudra surtout que cette lutte mette en tête de ses exigences les objectifs essentiels qui concernent tous les travailleurs: contre le chômage et les licenciements collectifs; contre la précarité et les salaires dérisoires qui vont avec; pour une augmentation conséquente du pouvoir d'achat des travailleurs.

À qui fera-t-on croire que toutes les entreprises qui affichent des profits florissants ne peuvent pas augmenter le pouvoir d'achat de leurs travailleurs? Elles le peuvent, mais elles ne le feront que si elles y sont contraintes.

Et que l'on ne nous dise pas que ce n'est pas possible, que l'économie va trop mal pour qu'on puisse satisfaire toutes ces revendications! L'économie est capable de dégager de 10 à 15% de profits supplémentaires pour la plupart des grands groupes industriels et financiers! Elle est capable d'assurer l'ascension permanente des grandes fortunes et des rétributions extravagantes pour les PDG des grands groupes capitalistes. (...)

L'économie dégage suffisamment de profits pour qu'il soit possible d'empêcher les licenciements collectifs.

(...) Il n'y a aucune raison, mais vraiment aucune, pour que le budget de l'État ou que les caisses de la Sécurité sociale servent de vache à lait pour les grandes entreprises. Il faut supprimer toute subvention directe ou indirecte aux grandes entreprises. Il faut augmenter, au contraire, les impôts sur les bénéfices des grandes sociétés et sur les hauts revenus. Cela représente des sommes considérables qui doivent être consacrées à la Sécurité sociale, aux hôpitaux, aux maisons de retraite, à la construction de logements sociaux, aux transports collectifs.

Voyez le plan gouvernemental de sauvetage, comme ils disent, de l'assurance-maladie. On demande un euro par consultation aux malades et quatorze euros par jour aux hospitalisés, mais on n'impose toujours pas les profits boursiers et on ne demande pas un seul euro aux bénéfices des entreprises, ni même qu'elles augmentent leurs cotisations sociales qui n'ont fait que baisser depuis quinze ans.

Les travailleurs d'EDF-GDF ont montré par leurs manifestations de jeudi qu'ils sont tous opposés au projet de changement de statut, c'est-à-dire en fait à la privatisation de leur entreprise. Ils dénoncent à juste raison que ce ne sont pas seulement leurs salaires, leurs retraites, voire leurs emplois qui sont menacés, mais aussi l'intérêt des usagers.

Une grande majorité de salariés est solidaire du combat de ceux d'EDF-GDF. Et, pourtant, malgré l'opposition de la majorité de la société, le gouvernement veut privatiser, pour complaire aux trusts privés qui veulent se jeter sur ce pactole profitable. On nous a dit que la privatisation, pour introduire la concurrence, ferait baisser les prix. Mais aujourd'hui on ne se gêne pas pour annoncer, dans une note confidentielle, que cela les fera augmenter.

Alors, oui, nous sommes contre toutes les privatisations dans le secteur public, présentes et à venir, et nous sommes pour revenir sur les privatisations déjà faites. Affaiblir les services publics, c'est un recul de toute la société, et c'est une attaque directe contre tous ceux qui sont forcés de compter.

Eh bien, ce sont ces idées-là que nous défendrons dans ces élections. Il ne s'agit pas que d'un programme électoral. Il s'agit aussi d'objectifs à mettre en avant dans les futures luttes sociales. (...)

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