États-Unis : "L'économie-alligator" et ses proies26/05/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/05/une1869.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : "L'économie-alligator" et ses proies

"L'économie-alligator" est la formule imagée qu'utilisent des économistes américains pour décrire la situation économique actuelle: les salaires y sont stagnants depuis dix ans ou même en baisse, illustrés par le profil de la mâchoire inférieure de cet animal, la pente montante de sa mâchoire supérieure figure, elle, les hausses du coût de la vie (loyer, transports, santé, en particulier).

Au moment où les autorités prétendent que le pays est sorti de la récession et va vers la prospérité, ces difficultés grandissantes touchent toutes les catégories de salariés.

Bien évidemment, la situation des travailleurs bien plus défavorisés, dits "working poors" (travailleurs pauvres), c'est-à-dire qui ont un emploi mais sont pauvres quand même, inflige un démenti aux propos des dirigeants américains. L'hebdomadaire d'affaires Business Week consacre un dossier à ce sujet. Il y redit que 24% des travailleurs, en ayant un emploi stable et à plein temps sur l'année, ont des revenus inférieurs ou égaux au seuil officiel de pauvreté. Cela concerne 26 millions de personnes. Étant donné le décalage existant entre la mesure officielle du seuil de pauvreté et une estimation du coût réel de la vie aujourd'hui, ce sont 40 autres millions de personnes qu'il faut rajouter si l'on veut avoir une plus juste idée de la situation de ces Américains qui ont du mal à joindre les deux bouts.

Dans ce même dossier, un autre exemple, celui des salaires versés par la chaîne de magasins Wal-Mart, première entreprise américaine par le chiffre d'affaires: la moyenne est de 9,64 dollars de l'heure, soit tout juste au-dessus du salaire de 9,06 dollars qui détermine le passage du seuil de pauvreté officiel pour un salarié nourrissant quatre personnes. Pour l'ensemble de ces "travailleurs pauvres", le salaire moyen serait de 7,09 dollars contre 17,15 dollars pour le salaire moyen de l'ensemble des salariés.

Il existe un salaire minimum aux États-Unis: il est de 5,15 dollars de l'heure. Une misère étant donné le coût de la vie, mais qui n'a fait réagir aucun politicien, ni parmi les Républicains ni parmi les Démocrates. La proposition la plus élevée d'un nouveau salaire minimum, 7 dollars, émane du sénateur démocrate du Massachusetts, Edward Kennedy, qui passe pour un libéral.

Le 5 mai dernier, Le Monde nous informait que "411 entreprises entrant dans l'indice d'une des Bourses de Wall Street affichent une hausse moyenne de 27% de leur rentabilité pour le premier trimestre 2004". Les véritables alligators, c'est là qu'ils sont.

Partager