Jugement de Marseille : Un encouragement pour les chômeurs22/04/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/04/une1864.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Jugement de Marseille : Un encouragement pour les chômeurs

Depuis le jeudi 15 avril, des chômeurs de Marseille ont la vedette. Ce jour-là, le tribunal de grande instance de Marseille a donné raison à 35 d'entre eux qui réclamaient un rappel de sept mois sur le montant de leurs allocations chômage. Elles leur avaient été supprimées en début 2004, bien plus tôt que ce qui avait été convenu au départ, lors de leur entrée au chômage.

Si le résultat de ce procès a fait tant de bruit, c'est qu'il peut concerner les quelque 265000 autres chômeurs indemnisés par les Assedic qui avaient, eux aussi, connu le sort des 35 de Marseille. Au total, 600000 chômeurs devraient subir une diminution plus ou moins importante de leurs allocations chômage par rapport aux engagements pris à leur égard, avant qu'entre en vigueur la nouvelle convention. Et tout le monde de se demander si ce jugement va faire jurisprudence et permettre à tous les autres chômeurs d'engager la même procédure judiciaire.

Incontestablement, ce jugement est une claque politique aux représentants du patronat, le Medef, qui avait été l'initiateur de la révision à la baisse des droits des chômeurs. Mais aussi une claque aux dirigeants syndicaux qui lui avaient emboîté le pas, plus particulièrement à Chérèque et à la CFDT qui entend être considérée comme un partenaire syndical privilégié du Medef, prêt à approuver tous les reculs imposés par le gouvernement et les patrons au monde du travail. Il fallait entendre les déclarations alarmistes de Chérèque, parlant de la faillite inéluctable des Assedic suite à ce jugement. Claque aussi pour le gouvernement qui avait donné son aval à cet accord entre les «partenaires sociaux», comme on dit.

Ces juges, qui ne sont pas des révolutionnaires, cela va sans dire, se sont appuyés sur le fait que les reculs imposés aux travailleurs n'étaient pas légaux, à un moment où la politique du patronat, relayée par le gouvernement, est de tenter de faire croire que la situation exige de «dépasser les archaïsmes» et de «ne pas se cramponner à la défense d'acquis».

C'est en ce sens que ce jugement est moralement positif. En ce qui concerne sa portée réelle, c'est une autre affaire. Les sept mois d'allocations qui devraient être versées aux 35 chômeurs de Marseille, si le président de la cour d'appel n'ordonne pas la suspension de l'exécution de ce jugement, ne vont pas rétablir la situation antérieure pour les centaines de milliers d'autres chômeurs victimes des mêmes pratiques. Le Medef et ses alliés peuvent fort bien introduire des procédures en appel qui feraient qu'il faudrait attendre au bas mot trois ans pour que ce jugement puisse faire jurisprudence. Et dans ce cas, il faudrait encore, pour ceux qui le peuvent, saisir la justice.

Pourquoi dès lors parler de faillite de l'Unedic, de trou supplémentaire de 1,5 milliard d'euros, si on redonnait à tous les anciens chômeurs leurs droits initiaux? Le patronat et ses alliés ont commencé à donner une partie de la réponse. C'est que, disent-ils, de toute façon, l'Unedic est aujourd'hui en déficit de plusieurs milliards d'euros. Les cotisations n'arrivent pas à couvrir le montant, pourtant déjà réduit, des allocations versées à des millions d'autres chômeurs qui, eux, ont vu, sans possibilité de contestation en justice, leurs droits diminués depuis le 1er janvier 2003.

Le patronat, de son côté, voudrait aller encore plus loin dans la remise en cause des droits des chômeurs, et en particulier il a en ligne de mire la fin de la non-dégressivité des allocations chômage. Il voudrait revoir à la baisse la convention actuelle qui devait courir jusqu'en 2005. Le leader de la CGC, le syndicat des cadres, l'a laissé entendre dans le journal La Tribune, mardi 20 avril, en exprimant son souhait que cette renégociation de la convention Unedic soit l'occasion de mettre la CGT et FO devant leurs responsabilités en les obligeant à se «mouiller» sur les mesures de sauvegarde de l'Unedic.

Une raison de plus pour que tous ceux qui sont victimes ou menacés par le chômage ne s'en arrêtent pas à des combats juridiques. Alors tant mieux si ce jugement pouvait redonner l'envie aux travailleurs de ne plus accepter les reculs qu'on veut leur imposer. Mais c'est sur le seul terrain des luttes que la classe ouvrière peut inverser le cours à rebours qu'elle subit depuis bien trop longtemps.

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