Les attentats terroristes n'émanciperont jamais personne18/03/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/03/une1859.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Les attentats terroristes n'émanciperont jamais personne

L'attentat de Madrid pose, une fois de plus, le problème du terrorisme que certains, dont ses auteurs, justifient comme étant une réponse au terrorisme d'État, aux dictatures, à l'oppression nationale, ethnique ou religieuse.

A Madrid, le choix de l'heure, du lieu, le nombre de bombes étaient calculés pour faire le maximum de victimes populaires possible. Tout semble accuser une organisation appartenant à ce qu'on appelle la mouvance "Al-Qaida", la même qui aurait détruit les deux tours jumelles du World Trade Center à New York le 11 septembre 2001. Les attentats ont visé des tours de bureaux, là aussi à une heure où s'y trouvaient rassemblés des milliers d'employés et de travailleurs.

Mais que ces actes terroristes soient des actes aveugles comme ceux-là, ou comme ceux des kamikazes palestiniens en Israël qui se font exploser avec leur bombe dans des autobus ou des lieux populaires, ou que ce soient des assassinats ciblés sur un représentant d'un pouvoir oppresseur, voire sur des tortionnaires, comme ce fut généralement le cas sous Franco des assassinats de l'ETA au Pays Basque espagnol et qui ont encore moins de justification depuis sa mort, le problème est le même: est-ce que ce genre d'actions peut servir à la libération des opprimés?

Nous appartenons à un courant du mouvement ouvrier, un courant socialiste qui s'est toujours opposé à ces actes terroristes, qu'ils soient ciblés ou aveugles. Cela ne date pas d'hier car à la fin du XIXe siècle ou au début du XXe, des groupes anarchistes ont largement utilisé de telles méthodes, que ce soit en France avec les bombes de l'anarchiste Ravachol et de ses amis qui assassinèrent le président de la République Sadi Carnot ou, en Russie tsariste, avec l'assassinat de hauts personnages du régime, en particulier du tsar Alexandre II.

On pourrait citer bien d'autres cas encore, comme par exemple les terroristes de l'Armée de Libération Irlandaise, le FLN algérien, sans parler des groupes d'extrême droite comme l'OAS et quelques autres aux États-Unis. Il ne faut pas oublier aussi que les assassinats terroristes en Palestine commencèrent avant l'indépendance d'Israël, contre l'occupation britannique après la IIe Guerre mondiale avec des organisations comme la Hagannah, l'Irgoun ou le groupe Stern, dont certains membres se sont retrouvés par la suite dans le gouvernement d'Israël. On pourrait citer aussi d'ailleurs la Résistance intérieure française qui s'illustra par des assassinats de gradés de l'armée allemande, de collaborateurs en vue, mais aussi de simples soldats allemands. Les résistants sont considérés ici comme des héros mais ce qu'ils faisaient n'était pas différent de ce que font les terroristes d'aujourd'hui.

Bien sûr, sous l'Occupation c'était la guerre, mais pour le peuple palestinien, irakien ou kurde, c'est la guerre aussi. Mais pas plus le terrorisme à prétention sociale, comme celui d'Action Directe, ni celui à prétention militaire, comme celui des Palestiniens en Israël, qui répondent aux massacres quasi aveugles de populations civiles par l'armée israélienne, ne sont justifiés.

On peut comprendre la haine engendrée dans une population par la dictature, par l'oppression, par l'humiliation, mais ceux qui prétendent la libérer de tout cela par des actions terroristes ne font que renforcer ses chaînes, voire en forger de nouvelles. Se libérer de l'exploitation, de la dictature et de l'oppression, pour construire une société libre, ne peut se faire que d'une façon démocratique, c'est-à-dire par la participation consciente et collective de larges fractions de la population.

Le terrorisme, c'est l'arme de groupes agissant dans le secret, clandestinement et absolument pas contrôlés par ceux qu'ils prétendent représenter. De là, d'ailleurs, toutes les manipulations possibles. Car les terroristes peuvent être, pour le choix de leurs cibles, manipulés par la police et les autorités, sans compter que les autorités peuvent aussi attribuer ces attentats à qui ils veulent en manipulant l'information, comme on l'a vu en Espagne. Quant à savoir qui fait quoi en Palestine ou en Irak, il est bien difficile aussi de le savoir vraiment.

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