Portugal : Réactions contre l'offensive patronale05/02/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/02/une1853.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Portugal : Réactions contre l'offensive patronale

Vendredi 23 janvier, les deux centrales syndicales portugaises appelaient les travailleurs de la fonction publique à faire grève pour des augmentations de salaires et les retraites.

En effet, le gouvernement propose que les salaires inférieurs à 1000 euros (55% des salariés et 57% des retraités) soient réévalués de 2%, alors que l'inflation est de 3%. Quant à ceux qui sont supérieurs, ils resteront bloqués et auront perdu plus de 5% de leur pouvoir d'achat en deux ans.

Bien des gens s'attendaient à ce que le président de la République Jorge Sampaio, qui appartient au Parti Socialiste, refuse de signer le décret promulgué par le Premier ministre de droite, Durao Barroso. Or il l'a signé, montrant que, pour s'attaquer au pouvoir d'achat des salariés, les socialistes sont bien d'accord avec la droite. D'ailleurs le président de la Banque du Portugal, Vitor Constancio, qui présentait la mesure comme "inévitable", est lui aussi un cacique du PS.

Le congrès de la centrale syndicale CGTP, proche du Parti Communiste, commençait le 30 janvier. Le secrétaire général, Carvalho da Silva, y a dénoncé l'offensive de la droite et du patronat: le bas niveau des salaires, la Sécurité sociale qui rembourse de moins en moins de dépenses, les droits des travailleurs et les droits syndicaux sans cesse réduits. C'est ainsi que le Premier ministre a déclaré au Parlement que, sur 1,5 million de salariés de l'État, seuls 300000 bénéficieraient de l'assistance médicale. Mais il ne suffit pas de dénoncer et d'organiser une journée de grève générale tous les douze ou quatorze mois (la dernière était en décembre 2002) pour faire reculer le patronat.

Car la dégradation de la situation sociale est générale. Les annonces de fermetures d'usines se succèdent. Vendredi 30 janvier à la prise du travail, les 450 salariées de l'entreprise Brax, qui fabrique des chaussures et des vestes en cuir, ont trouvé portes closes. Les fermetures touchent aussi nombre de petits commerces, d'entreprises artisanales ou familiales.

Des grèves éclatent sporadiquement. Les 7 et 8 janvier, le personnel municipal de Porto a fait grève contre l'absence de réfectoire, rejoint par les éboueurs. Les hospitaliers protestent contre les heures supplémentaires qui s'accumulent, impayées depuis trois ans. Il y a périodiquement des mouvements de médecins.

Le mécontentement touche jusqu'à la police. Elle dénonce un taux de suicides supérieur à la moyenne nationale, le manque de formation et d'effectifs. Elle se dit incapable d'encadrer l'Euro de football, qui se déroule au Portugal cette année, et demande qu'on fasse appel à des renforts policiers venus d'autres pays.

Tous ces mécontentements s'expriment dans une ambiance de morosité devant l'extension du chômage, les privatisations, la précarisation de l'emploi, la disparition programmée de tous les droits des salariés. Les cas de corruption suscitent la révolte, mais sans espoir d'y voir porter remède, tant le mal est général et les coupables bien protégés.

Ainsi la gendarmerie (GNR) et d'autres services officiels sont mêlés à un détournement de plusieurs millions d'euros de péages au profit de responsables de la société d'autoroutes Brisa. 41 inculpés sont aux arrêts... à domicile. Par ailleurs chaque mois apporte son lot de révélations sur le réseau pédophile de la Casa Pia de Lisbonne, une institution censée s'occuper des enfants déshérités. Mais on a l'impression que les inculpés, politiciens, médecins, gens du spectacle, ne sont que du menu fretin et que les milieux dirigeants sont plus profondément gangrenés.

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