Les chercheurs ne désarment pas05/02/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/02/une1853.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les chercheurs ne désarment pas

La mobilisation des chercheurs s'amplifie. Ils étaient plusieurs milliers, jeudi 28 janvier, à manifester dans différentes villes de France, aux cris de: "Haigneré en orbite, la recherche est en faillite".

La situation de la recherche publique est en effet catastrophique. Le gouvernement a brutalement coupé les finances de la plupart des laboratoires, les empêchant de fonctionner normalement. Ceux-ci en sont encore à attendre en vain le versement d'une partie des crédits promis pour l'année 2002! Quant aux recrutements, ils sont en chute libre, le ministère s'étant même cru autorisé à transformer sans préavis 550 postes en simples CDD.

Le succès de la pétition (signée par près de 40000 personnes), puis des manifestations, a de quoi inquiéter le gouvernement, même si celui-ci, pour le moment, prend la contestation de haut. A l'issue de la manifestation, Raffarin a opposé une fin de non-recevoir aux demandes d'entrevue de l'intersyndicale. Quant

à la ministre Claudie Haigneré, elle tente de noyer le poisson en nommant une "mission chargée de procéder à l'examen contradictoire de la situation des crédits des laboratoires publics". Comme si cette situation, parfaitement connue, n'était pas précisément ce qui avait déclenché la colère des manifestants!

Pourtant, Chirac, candidat puis président, n'a pas été avare de grands discours sur l'importance de la recherche, parlant notamment, lors de ses voeux de début d'année, d'augmenter les dépenses de recherche pour les porter à 3% du produit national. Evidemment, rapporté aux actes, cela sonne comme un mensonge pur et simple... Un de plus.

Un peu gênés aux entournures, certains membres du gouvernement expliquent que ce chiffre concerne l'effort global de recherche, autrement dit qu'il faut diminuer la part de la recherche publique, pour augmenter celle du privé. Mais l'idée selon laquelle la diminution des crédits aux organismes publics de recherche se traduirait par un investissement accru de la part des entreprises privées est une fable.

Car la recherche publique, bien davantage que les entreprises privées, explore des domaines de la connaissance qui ne promettent pas forcément d'applications rentables à court terme. Même si au bout du compte, les entreprises finissent par tirer profit des avancées de la recherche fondamentale, et même si une partie importante de la recherche publique est d'ores et déjà soumise aux critères de rentabilité, celle-ci conserve malgré tout une relative indépendance vis-à-vis des impératifs dictés par le profit. C'est ce qui fait son utilité sociale, et c'est aussi pour cela que la bourgeoisie fait aujourd'hui le choix de la sacrifier, au même titre que n'importe quel autre service public.

Les directeurs de laboratoire ont menacé le gouvernement de démissionner collectivement de leurs fonctions le 9 mars prochain, si d'ici là celui-ci n'avait pas reculé sur le versement des crédits de fonctionnement et sur la création de postes. Cette détermination affichée par le mouvement est son meilleur gage de succès. Avec les chercheurs, le gouvernement pourrait bien ne pas être au bout de ses peines.

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