Le PS et le chômage : Une "autre démarche"... du pareil au même08/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1849.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le PS et le chômage : Une "autre démarche"... du pareil au même

L'intervention de Chirac du 31 décembre et son annonce d'une "grande loi de mobilisation sur l'emploi" ont contraint les dirigeants du Parti Socialiste à réagir, campagne électorale oblige. Le premier secrétaire du PS, Hollande, a annoncé, le 4 janvier, lors d'une émission du Grand jury RTL-Le Monde-LCI qu'il aurait une "autre démarche" pour l'emploi que celle du gouvernement de droite.

Hollande fait mine de s'indigner de l'attitude de Chirac: "J'ai été surpris par sa désinvolture. Le 31 décembre, il dit qu'il faut se mobiliser pour l'emploi; quelques heures plus tard, le 1erjanvier, c'est la fin de toute indemnisation pour 180000 chômeurs et la fin de toute allocation pour plus de 110000 bénéficiaires de l'Allocation spécifique de solidarité." Le secrétaire national du PS des questions économiques et de l'emploi, Eric Besson, a dénoncé de son côté la "vraie désespérance sociale" qui peut se transformer en "rupture sociale", dont Chirac porte la responsabilité, "puisque le pilotage macroéconomique de son gouvernement est un échec". Et de rappeler que si le chômage a baissé de 0,2% en novembre, il a augmenté de 6,2% en un an, soit 145000 chômeurs de plus en 2003. En effet, mais que doivent penser les milliers de travailleurs licenciés durant toutes les années de gouvernement de gauche, du pilotage du chômage par celui-ci?

Mais puisque Hollande critique la politique de l'emploi de Chirac, il lui faut bien parler de la sienne. Nous apprenons ainsi, même s'il ne le dit pas bien fort, qu'il a un plan, un "plan de développement de l'emploi", qui comporterait quatre "pistes". "D'abord, dit-il, il faut une relance de la croissance en soutenant la consommation, aujourd'hui freinée par la modération salariale à l'oeuvre depuis dix-huit mois". Dix-huit mois? N'est-ce pas plutôt depuis plus de vingt ans? Mauroy, alors qu'il était Premier ministre de Mitterrand, n'a-t-il pas décidé, en 1982, du blocage des salaires? Aujourd'hui, le PS n'a pas plus qu'alors l'intention de rompre avec la "modération salariale".

La deuxième piste du plan de Hollande consiste en un changement du mode de calcul des cotisations sociales, "en partant de la richesse produite, la valeur ajoutée, de sorte que les entreprises qui ont de la main-d'oeuvre paieront moins et celles qui font tourner de l'argent pour faire de l'argent paieront plus". Mais cette proposition, déjà faite par Jospin, ne s'est traduite dans les faits que par des allégements de charges sociales pour les patrons, c'est-à-dire des cadeaux supplémentaires sous prétexte de favoriser les créations d'emplois.

Le gouvernement Jospin n'est jamais revenu, par exemple, sur la diminution, décidée par le précédent gouvernement de droite de Juppé, du taux de la tranche la plus élevée pour les impôts directs, de 56,5 à 54%, cadeau de plus de 3 milliards d'euros (23 milliards de francs) fait aux plus riches, alors que, dans le même temps, il décidait d'étendre la CSG, et d'en augmenter le taux de 3,4% à 7,5%. Il n'est pas très étonnant que le premier secrétaire du Parti Socialiste ne soit pas plus précis dans ses propositions: il ne veut surtout pas s'engager à défaire ce qu'il dit critiquer dans la politique de Chirac-Raffarin. Et pour cause, continuer à arroser les patrons avec l'argent public, le PS est pour, comme l'avoue le même Eric Besson, dans une interview au journal Le Parisien du mardi 6 janvier: "Quant à la baisse des charges, si le coût du travail des personnes les moins qualifiées peut être un objectif, c'est à deux conditions: ne pas le faire sans contrepartie et ne pas parier en permanence sur la précarité". Le PS ne renonce pas à baisser les charges sociales pour les patrons, mais seulement, et vaguement, d'y mettre des conditions.

Les deux dernières propositions du plan de Hollande ne sont pas plus convaincantes. Il propose en effet, plutôt que le RMA, un "contrat d'insertion" pour tout chômeur de plus de deux ans ainsi que "la création d'emplois d'utilité sociale" sur le plan régional, "financés par l'État et les collectivités locales dans tous les domaines où il y a des besoins". Il s'agirait donc de créér de nouveaux contrats précaires et sous-payés, sous un autre nom. La gauche, quand elle était au gouvernement, n'a d'ailleurs pas fait autre chose que d'augmenter la précarité. Les emplois créés, selon le porte-parole socialiste, grâce aux 35heures et à la création des contrats d'emplois-jeunes, ont été pour la plupart des emplois précaires, en contrats à durée déterminée ou en intérim, ou bien encore des emplois à temps partiel imposé ne procurant que des ressources inférieures au Smic.

Hollande va avoir du mal à convaincre les travailleurs que le PS pourrait mener une politique différente de celle qu'il a menée quand il était au pouvoir, et de celle que mènent aujourd'hui Chirac et Raffarin. Le gouvernement de droite attaque les travailleurs, durement et à visage découvert, sans chercher à masquer son soutien aux plus riches et au patronat. Mais le Parti Socialiste ne peut faire oublier le triste bilan de son gouvernement qui se montra, lui aussi, infiniment plus sensible aux arguments patronaux qu'aux besoins des classes populaires.

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