Rapport de la commission Stasi : Il faut permettre aux femmes de résister à l'oppression18/12/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/12/une1846.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Rapport de la commission Stasi : Il faut permettre aux femmes de résister à l'oppression

Mise en place en juillet 2003 par Chirac, la commission Stasi avait pour tâche de "mener une réflexion sur l'application de la laïcité" suite aux problèmes posés par le port du voile islamique à l'école.

À l'issue de ses délibérations, après des mois d'auditions, elle préconise l'interdiction légale du voile au sein des établissements scolaires. Pour faire bonne mesure et marquer l'équilibre, elle propose aussi l'interdiction de la kippa et de la grande croix, de tous les "signes ostensibles (...) des signes et tenues vestimentaires manifestant une appartenance religieuse et politique." En même temps, sans doute afin de montrer qu'il n'est nullement question pour les "sages" de s'en prendre à la religion, la commission recommande deux jours fériés supplémentaires, l'Aïd el Kebir et le Kippour, l'un pour les musulmans et l'autre pour les juifs. Là, on se demande s'il s'agit d'un coup de pied de l'âne au gouvernement ou d'un calcul basé sur le fait qu'il ne l'acceptera pas alors qu'il vient de décider la suppression d'un jour de congé, prétendument pour venir en aide aux personnes âgées.

Reste que la commission Stasi a donc estimé qu'il ne faut pas admettre le port du voile à l'école et a recommandé qu'une loi le confirme. Et Chirac s'est prononcé pour. Cette affirmation n'aurait sans doute pas été possible si des enseignants n'avaient pas refusé de faire cours à des jeunes filles voilées, s'ils ne s'étaient pas mobilisés pour refuser le port du voile, pas seulement au nom du respect de la laïcité, mais aussi et surtout au nom de la défense des droits des femmes.

Aujourd'hui, dans les banlieues un islam intégriste se développe. Au nom de préjugés barbares et réactionnaires, des hommes -des pères, des grands-frères et aussi des petits caïds ignorants et violents - exercent une pression grandissante sur les jeunes filles et les femmes pour les réduire au seul rôle de reproductrices, les enfermer, les cacher sous le voile. Des jeunes filles sont mariées de force à des hommes, parfois bien plus vieux qu'elles, qu'elles ne connaissent pas et n'ont pas choisis. À l'hôpital les maris qui les accompagnent refusent qu'elles se fassent examiner par des médecins-hommes. Certaines municipalités ont cédé sur le fait de réserver les piscines aux femmes à certaines heures et certains jours. Dans des cités, elles ne peuvent regarder un garçon en face ni porter les vêtements de leurs choix ni se maquiller sans se faire traiter de "putes".

Alors, il faut être du côté de toutes celles qui refusent cette oppression, qui veulent être traitées comme des êtres humains à part entière.

Si l'avis de la commission Stasi est suivi d'une loi, de nombreux enseignants qui ont été confrontés au problème ces derniers temps s'en réjouiront car ils auront à leur disposition un texte sur lequel s'appuyer pour s'opposer au port du voile à l'école. Ce sera aussi et surtout un appui pour toutes les jeunes filles qui veulent résister aux pressions sexistes qu'elles subissent, et qui attendent une aide de la société.

Mais une loi ne vaut d'abord que par ce qu'elle contient et cela on le verra quand, après des tas de parlottes, elle sera adoptée ou pas. Car il y aura au Parlement des pressions et des amendements de tout ce qu'il y a de réactionnaire du côté de toutes les institutions religieuses. Ensuite, une loi, même si elle est juste et bonne, ne compte que selon ce l'on en fait. Si donc cette loi est adoptée, elle ne mettra pas fin par elle-même aux pressions subies dans la famille et dans les cités par les filles de bien des quartiers. Elle pourra seulement être un point d'appui pour elles et pour ceux des enseignants qui veulent les aider.

C'est à toute la société d'imposer un autre type de relations entre hommes et femmes basé sur la liberté et le respect mutuel, que ce soit à l'école ou dans les cités; à commencer par un coup d'arrêt à ce terrible recul de la condition féminine dont le voile est le témoignage. Et c'est à toute la société d'offrir une juste place à tous ceux qui sont d'origine maghrébine, femmes et hommes.

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