Chirac en Tunisie pour les capitalistes français12/12/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/12/une1845.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Chirac en Tunisie pour les capitalistes français

Tout au long de son séjour officiel en Tunisie, du 3 au 6 décembre, Chirac n'a cessé de tenir des propos affectueux et élogieux pour la Tunisie, son peuple et surtout Ben Ali, président depuis 1987, soulignant «la consolidation de la démocratie» dans le pays.

Dans le même temps, une avocate, Radhia Nasraoui, poursuivait une grève de la faim depuis 50 jours. Chirac affirme être intervenu en sa faveur, il en aurait même «touché un mot» au président Ben Ali. Toutefois, il a pris bien soin de tempérer son propos par des petites phrases telles que: «Des personnes qui font la grève de la faim, il y en a un peu partout et même parfois en France»; en clair, il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Pourtant, fréquemment, des associations humanitaires ou de défense des droits de l'homme dénoncent la répression dont sont victimes les opposants au gouvernement tunisien, qu'ils soient religieux islamistes ou de gauche ou d'extrême gauche. Selon Amnesty International, les prisons tunisiennes retiendraient plusieurs centaines de détenus pour délit d'opinion. La presse est bâillonnée, la population soumise à la surveillance constante d'une armée de policiers et d'indicateurs, la torture fréquente.

Il en faut sans doute un peu plus pour inquiéter et émouvoir le président français, qui avait à l'évidence bien d'autres soucis. Quelques jours auparavant, le président tunisien avait accueilli le secrétaire d'État du gouvernement américain de Bush, se présentant comme un croisé de la démocratie et de la lutte contre le terrorisme. Chirac, qui se doit de défendre les intérêts stratégiques de la France comme les intérêts de ses capitalistes face aux appétits des États-Unis, exprimant notamment lors de ce voyage son «admiration» pour la politique étrangère du gouvernement tunisien, qui a signé en 1995 un accord d'association avec l'Union européenne, et le félicitant d'avoir pris l'initiative d'une conférence internationale des pays européens et nord-africains riverains de la Méditerranée occidentale, ne pouvait pas faire moins.

Même si le gouvernement français entraîne avec lui dans cette aventure ses voisins d'Espagne et d'Italie, le jeu est inégal. Alors, à défaut de pouvoir faire miroiter au gouvernement tunisien des prêts et des investissements compétitifs avec ceux que peuvent faire espérer le gouvernement américain, Chirac peut toujours flatter, vanter l'ouverture de la Tunisie à la «modernité», offrir sa complaisance, un soutien politique total et fermer les yeux sur les atteintes multiples aux droits et aux libertés de la population tunisienne.

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