Chili : L’Église contre le divorce29/10/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/10/une1839.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Chili : L’Église contre le divorce

En 1997, les députés chiliens avaient approuvé majoritairement un projet de loi autorisant le divorce, mais ce n'est que cette année que les sénateurs pourraient autoriser celui-ci. L'Église chilienne, qui depuis un siècle s'oppose à tous les projets de loi visant tant soit peu à réformer le code civil du mariage et à permettre le divorce, est repartie en campagne pour faire avorter ce projet.

Depuis huit ans, tout ce que le Chili compte de vieilles barbes réactionnaires, hommes de droite et anciens soutiens de Pinochet, mais aussi dignitaires de l'Église en tête, se sont activés pour faire barrage à une loi pourtant bien timide et peu engageante pour ceux et celles qui devront y avoir recours.

En effet, d'après le projet, les époux candidats au divorce devront l'être d'un commun accord. Si ce n'est pas le cas, ils devront attendre cinq ans. S'ils sont consentants, il leur faudra non seulement entendre les conseils avisés de prétendus professionnels, mais le délai de réflexion sera encore de trois ans.

Tout ceci est encore trop pour l'Église. Pour peser sur la décision des sénateurs, elle paye des spots télévisés qui chargent le divorce de tous les maux de la société. Elle a d'ailleurs puisé ses arguments dans la propagande la plus réactionnaire du président Bush. Échec scolaire? Délinquance juvénile? Alcoolisme et toxicomanie des adolescents? Violence des jeunes? Tout serait la faute de la séparation des parents.

Le bon sens et la logique n'ont jamais été le point fort d'une Église qui prêche le dogme de l'immaculée conception, mais c'est d'autant plus risible qu'à l'heure actuelle, avec ou sans loi sur le divorce, un enfant chilien sur deux naît en dehors des liens du mariage. Depuis la fin de la dictature militaire, le nombre des mariages a chuté de 100000 à 60000 par an, tandis que l'union libre, elle, s'est développée.

L'Église chilienne, qui avait redoré un peu son blason en défendant les droits de l'Homme contre la dictature, égratignée ces jours-ci dans des affaires de pédophilie, renoue à propos du divorce avec sa tradition réactionnaire qui l'a conduite, au Chili comme partout ailleurs, à tenter d'imposer à la société civile des moeurs d'un autre âge, en s'opposant notamment à tout ce qui pouvait améliorer la vie personnelle des individus et en premier lieu la liberté des femmes.

C'est en effet contre l'Église que se sont menés tous les combats contre l'obscurantisme, par exemple pour imposer la diffusion des moyens contraceptifs, le droit à l'avortement et même la généralisation des méthodes d'accouchement dites sans douleur. Des droits élémentaires qui restent d'ailleurs largement à conquérir non seulement dans toute l'Amérique latine mais également dans une partie de l'Europe comme en Irlande ou en Pologne.

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