Grande-Bretagne : La mort d’un expert25/07/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/07/une1825.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne : La mort d’un expert

La mort du docteur David Kelly, chef des experts en "armes de destruction massive" de l'armée britannique depuis plusieurs années, aura eu bien plus de retentissement dans le microcosme politique et médiatique anglais que celle des milliers d'Irakiens innocents assassinés au cours de ces mêmes années avec la complicité agissante de Londres.

A en croire la thèse officielle, développée à longueur de pages et même de suppléments spéciaux, dans tous les grands quotidiens britanniques, Kelly se serait suicidé. Chargé de la surveillance des armements irakiens, il aurait craqué après qu'eut été rendu public le fait qu'il avait accusé Blair et ses ministres, devant un journaliste de la BBC, d'avoir délibérément gonflé les estimations qui leur avait été fournies sur l'armement irakien. Les mensonges de Blair sont indéniables. Quant au reste, c'est possible, encore qu'il resterait selon la police elle-même bien des questions sans réponse pour confirmer la thèse du suicide. Quoiqu'il en soit, tout cela ne fait pas du docteur Kelly une victime, et encore moins l'espèce de "martyr de la vérité" dont voudrait en faire la presse aujourd'hui.

Kelly était un scientifique de haut niveau qui commença par mettre ses capacités au service de la fabrication d'"armes de destruction massive" (chimiques et bactériologiques) pour le compte de l'impérialisme britannique. Par la suite, il fut promu au rang d'expert dans la surveillance des pays pauvres comme l'Irak auxquels l'impérialisme voulait imposer ses diktats. Kelly avait choisi son camp et c'était celui des pouvoirs d'argent.

Kelly a-t-il trouvé déplaisant que des politiciens ignorants travestissent ses conclusions pour justifier leur politique, ce qui ne serait pourtant pas la première fois ? A-t-il voulu rétablir la vérité après coup à propos de l'Irak ? En tout cas, il s'était bien gardé de parler tant que de telles révélations pouvaient encore avoir un impact sur les événements - c'est-à-dire avant le début de l'invasion, lorsque l'opinion publique britannique se sentait encore mobilisée et forte face aux projets de participation britannique à la guerre, et où Blair ne pouvait se permettre aucune fausse note dans son propre camp. Sur ce plan-là aussi Kelly avait choisi son camp.

Aujourd'hui la mort de Kelly est venue s'ajouter à la longue liste des leurres agités devant l'opinion publique pour détourner son attention de la politique guerrière de Blair en Irak - politique que l'électorat populaire, travailliste en particulier, continue à réprouver très majoritairement.

En détournant les feux de la critique contre la BBC, accusée d'avoir acculé un "malheureux" informateur au suicide en révélant son identité (ce qu'elle n'a d'ailleurs pas fait), la machine de propagande gouvernementale s'efforce avant tout de protéger les institutions de l'Etat qui viennent de démontrer une fois de plus que, sous la direction du Parti Travailliste comme auparavant sous celle du Parti Conservateur, elles ne reculent devant aucun mensonge pour justifier une politique au service des intérêts prédateurs du grand capital.

Reste à savoir, néanmoins, si de tels subterfuges seront suffisants pour permettre à Blair de sauver sa place.

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