Brésil : Lula s'attaque aux fonctionnaires03/07/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/07/une1822.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil : Lula s'attaque aux fonctionnaires

Au Brésil, Lula et son gouvernement ont lancé leur réforme du système de retraite des fonctionnaires. Ils prétendent que ces retraites menacent l'équilibre de la Sécurité sociale, qui gère les dépenses de santé et les retraites, et qu'elles sont scandaleusement élevées.

Le gouvernement cite l'exemple de retraités qui toucheraient en effet jusqu'à 50000 reais, soit 15000 euros. C'est énorme, surtout comparé au salaire minimum qui vient de passer à 240 reais, 75 euros, mais ces retraites en or ne concernent évidemment qu'une poignée d'anciens hauts fonctionnaires, qui comptent rarement sur la Sécurité sociale pour assurer le confort de leurs vieux jours.

Or la réforme va réduire les revenus de la masse des retraités de la fonction publique. La pension des actuels retraités ne pourrait dépasser 17 170 reais, 5141 euros. C'est encore confortable, pour les quelques privilégiés qui y auront droit. Ceux qui touchent moins conserveraient leur pension. Mais pour tous les fonctionnaires encore en activité, le plafond serait sept fois moins élevé.

Le maximum des pensions serait aligné sur celui du privé: 2400 reais, 514 euros. Plus question donc d'assurer aux fonctionnaires fédéraux le maintien de leurs revenus, comme c'était à peu près le cas jusqu'ici. La pension ne serait plus calculée sur le dernier salaire, mais sur une moyenne des salaires, ce qui aboutirait à réduire radicalement les montants versés. De plus, les retraités cotiseraient désormais à la Sécurité sociale, au taux de 11%, à partir de 1058 reais, 317 euros. Enfin, l'âge minimum pour prendre sa retraite passerait pour les femmes de 48 à 53 ans, et pour les hommes de 53 à 60 ans.

Cette réforme nécessite de modifier la Constitution, ce qui requiert une majorité des deux tiers du Parlement. Elle a donc été l'occasion pour le gouvernement, dirigé par le Parti des Travailleurs (PT), de s'allier avec le PMDB, un parti de droite qui restait jusque-là à l'extérieur de la majorité gouvernementale. En échange de postes de direction dans la fonction publique, et sans doute bientôt d'un ou plusieurs ministères, les 68 députés et les 19 sénateurs du PMDB rendront possible le mauvais coup contre les retraites des fonctionnaires.

La réaction des salariés du public a été vive. Près de 30000 ont manifesté à Brasilia, la capitale fédérale, le 11 juin, aux cris de "Lula, tu nous as trahis!" Certains parlementaires du PT ont été défendre devant eux la réforme des retraites. Ils ont été copieusement hués, tout comme le président de la centrale syndicale CUT, Luis Marinho, qui est lié à la direction du PT. Une grève générale de la fonction publique est annoncée pour le 8 juillet.

En même temps, des fonctionnaires continuent à mener des luttes pour des augmentations de salaire. C'est le cas d'employés municipaux à Santo André et Maua dans la banlieue de Sao Paulo, à Campinas dans l'état de Sao Paulo, à Blumenau dans l'état de Santa Catarina. A Belo Horizonte, les enseignants ont fait annuler un projet de notation de leur travail qui réduisait la sécurité de l'emploi.

Lula et ses partisans peuvent bien jurer que les sacrifices qu'ils imposent aux fonctionnaires et les cadeaux qu'ils font aux capitalistes nationaux et internationaux ne visent qu'à assurer, dans un deuxième temps, plus d'emplois et de meilleurs revenus à tous les travailleurs. Les journalistes peuvent s'extasier du "renouveau politique" au Brésil, de "l'expérience inédite" tentée par Lula et du "modèle alternatif" qu'il offrirait. Ces promesses et ces couronnes de papier ne font pas reculer les inégalités, les bas revenus, le chômage et la faim.

C'est pourtant ce que seraient en droit d'exiger les travailleurs brésiliens. Mais Lula n'a d'oreilles que pour les compliments intéressés des économistes et des hommes d'affaires, des techniciens du Fonds Monétaire International, du président Bush lui-même. Décidément, rien de tel que les politiciens "de gauche" pour mener une politique de droite.

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