Naufrage du "Prestige" : Les pollueurs ne veulent pas être les payeurs15/05/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/05/une1815.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Naufrage du "Prestige" : Les pollueurs ne veulent pas être les payeurs

Le Fipol, fonds couvrant les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, a provoqué un tollé général en annonçant qu'il indemniserait à hauteur de 15% seulement les victimes françaises, espagnoles et portugaises de la marée noire provoquée par le naufrage du Prestige en novembre dernier. Alors que le préjudice total est estimé à 1 milliard d'euros, les représentants du Fipol ont déclaré qu'ils ne disposaient que d'une enveloppe de 171,5 millions d'euros.

Ce n'est pas la première fois que cette agence intergouvernementale, qui est censée se substituer aux compagnies pétrolières pour indemniser les victimes de pollutions, n'honore pas ses engagements. Qu'il s'agisse des communes ou des particuliers, la plupart des victimes de l'Erika, navire qui a sombré au large du Finistère en 1999, ont dû se contenter d'indemnités ne couvrant même pas 20% des dégâts produits.

En fait, cette agence, à laquelle participent 77 États et dont le budget est alimenté par des taxes prélevées sur l'industrie pétrolière par chaque État membre, agit surtout comme un paravent derrière lequel les compagnies s'abritent pour dégager leur responsabilité en matière d'indemnisation. Et il leur importe peu que cet organisme ne dispose pas des ressources suffisantes pour faire face à l'ampleur et à la multiplication des catastrophes.

En matière de pollution, les pétroliers bénéficient d'ailleurs de la complicité des États et de leur justice, alors que ceux-ci pourraient renforcer les contrôles sur l'état des navires assurant le transport des produits pétroliers. Et ils pourraient aussi appliquer systématiquement le principe de pollueur-payeur, en multipliant par dix ou plus si nécessaire les taxes prélevées au titre du Fipol, ou mieux encore en obligeant la compagnie propriétaire de la cargaison -Total, en ce qui concerne le Prestige- à indemniser directement et intégralement les victimes.

Ce n'est manifestement pas dans cette voie que l'actuel gouvernement s'est engagé. Afin de compenser la défaillance du Fipol dans l'affaire du Prestige, il a seulement décidé que "le remboursement des factures présentées par l'État se fera en dernier", c'est-à-dire après les victimes privées. Ce faisant, le gouvernement ne fait que déplacer le problème en reportant sur les contribuables tout ou partie d'une addition qu'il devrait présenter à Total.

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