Les mensonges du gouvernement15/05/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/05/une1815.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les mensonges du gouvernement

Peu avant la journée du 13 mai, Raffarin s'est payé une pleine page dans les journaux pour justifier son attaque en règle contre les retraites. C'est évidemment un tissu de mensonges qui jette une lumière crue sur la mauvaise foi du Premier ministre.

Il reprend le prétexte de la démographie (un actif pour un retraité en 2020 contre deux aujourd'hui) pour affirmer: "Si nous ne faisons rien aujourd'hui, dans moins de 20 ans nos pensions seront réduites de moitié" comme s'il s'agissait d'un simple calcul arithmétique! Cela n'a rien à voir.

Effort partagé... toujours par les mêmes

D'ailleurs, quand le ministre nous rappelle qu'il y avait en 1960 quatre actifs pour un retraité, comment explique-t-il qu'à l'époque les pensions de retraite étaient si minables et que les vieux travailleurs étaient qualifiés "d'économiquement faibles"? Il a fallu que les salaires augmentent et que les règles de calcul des retraites soient améliorées pour que la pauvreté et le dénuement régressent progressivement parmi les vieux travailleurs et rejoignent le même niveau de pauvreté que l'ensemble de la population -ce qui est encore considérable. Cette amélioration a eu lieu alors que le nombre d'actifs par rapport au nombre de retraités a justement été divisé par deux. C'est que, d'une part, le revenu national, c'est-à-dire la quantité de richesses produites, a dans le même temps été multiplié par trois ou quatre. Et que les travailleurs en ont profité, un peu, mais beaucoup moins que le patronat.

C'est ce calcul, social et non pas arithmétique, que les gouvernements et les experts à leur solde s'efforcent de nous cacher. Car la vérité, c'est que le patronat entend bien être le seul dans les années à venir à profiter de l'augmentation de la productivité et du revenu national. Non seulement il ne veut rien laisser aux travailleurs, qui sont pourtant ceux qui produisent ces richesses, mais il entend encore continuer à réduire leur part comme il s'y emploie, malheureusement avec succès, depuis un quart de siècle.

Si, par contre, la part des travailleurs augmentait, les salaires pourraient être augmentés et les retraites aussi!

Et c'est tout à fait possible car de l'argent, il y en a. On voudrait nous faire croire qu'il n'y aurait plus d'argent pour payer les retraites dans un proche avenir. Certes les caisses pourraient bien finir par se vider si l'État continue à puiser dans les caisses du régime général pour payer des prestations qui devraient être à sa charge et pour faire des cadeaux aux patrons en les exonérant de plus en plus de cotisations sociales, et si dans le même temps, alors que les salaires continuent à être rognés par le chômage et la précarité, on veut obliger les salariés et eux seuls à financer les retraites. Cela implique en effet une réduction considérable du niveau de vie des salariés comme des retraités.

C'est là la méthode du gouvernement, ce que Raffarin appelle avec un culot monstre "un effort partagé"! C'est un effort partagé entre salariés et retraités, un effort du monde du travail et de lui seul, un effort auquel le patronat n'est pas le moins du monde associé. Au contraire, puisque c'est encore l'occasion pour le gouvernement de lui dispenser de nouvelles aides, sous prétexte de l'inciter à garder les travailleurs âgés au travail plus longtemps.

Le patronat doit payer

Mais si on exigeait d'abord que la Sécurité sociale ne serve plus de vache à lait au patronat et à l'État et que celui-ci lui paye tout ce qu'il doit, cela ferait des dizaines de milliards de francs supplémentaires chaque année. Et puis il faudrait exiger que le patronat paye sa part. Avant la crise, la protection sociale était financée à hauteur de 80% par le patronat et de 20% par les cotisations des salariés. Dans les années 1990, la part patronale est tombée à 60% et celle des travailleurs est montée à 40%. Aujourd'hui, alors que les exonérations de charges sociales se sont poursuivies pour le patronat, remplacées parfois par des impôts payés par les salariés, les chômeurs et les retraités, comme la CSG, il est impossible de savoir quelle part est réellement payée par le patronat, mais il est certain qu'elle a encore fortement baissé.

Aujourd'hui les richesses produites sont utilisées d'abord pour garantir les profits des patrons et les dividendes des actionnaires. Mais il faudrait au contraire qu'elles servent d'abord à permettre aux travailleurs de vivre décemment, qu'ils soient en activité ou retraités. Car c'est le travail de la classe ouvrière qui produit toutes ces richesses, de plus en plus accaparées par une minorité d'exploiteurs qui se croient tout permis. La société n'a jamais été aussi riche (la productivité horaire du travail a été multipliée par 16 en un siècle); mais il faudrait que les travailleurs se sacrifient encore pour accroître la richesse d'une minorité insatiable.

Les travailleurs ont les moyens de mettre un coup d'arrêt à cette attaque. Ils peuvent refuser de se laisser dépouiller et réduire à la portion congrue. Ils peuvent exiger du patronat qu'il rende une partie de ce qu'il a volé et qu'il paye ce qu'il faut pour que les vieux travailleurs aient tous les moyens de vivre "une nouvelle vie" après une vie de labeur et d'exploitation.

Les travailleurs ont déjà trop donné. C'est aux patrons de payer!

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