Irak : Main basse sur le pétrole10/04/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/04/une1810.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Main basse sur le pétrole

Qui payera les frais de la guerre que livrent actuellement les États-Unis et l'Angleterre en Irak? Pour le vice-président américain Dick Cheney, cela ne fait aucun doute: les frais de la guerre doivent être payés par l'Irak. Le "butin de guerre", c'est le pétrole irakien, et les États-Unis entendent se rembourser et gonfler les bénéfices de leurs trusts en puisant dans les réserves de brut irakien.

C'est pourquoi le Pentagone a demandé à Philip Carroll d'organiser l'exploitation et la prospection de l'or noir irakien. Ce Texan a dirigé jusqu'en 1998 la branche américaine de la compagnie pétrolière anglo-hollandaise Shell. Il est ensuite devenu, jusqu'à l'année dernière, le patron de la société Fluor Corp, une des entreprises qui doit empocher un gros contrat dans la reconstruction de l'Irak.

Les compagnies pétrolières européennes, notamment le français TotalFinaElf et le russe Lukoil continuent de se cramponner à l'espoir de voir les Nations Unies se charger de l'après-guerre. Si, comme bien des signes semblent l'indiquer, les États-Unis se passent de l'ONU après la guerre comme ils s'en sont passé avant celle-ci, on n'a pas fini d'entendre les jérémiades de ceux dont les intérêts seront floués et qui dénonceront une fois de plus "l'illégalité" de l'action des États-Unis.

Le directeur du Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), dont l'activité a un caractère humanitaire, en a déjà donné un échantillon en déclarant que "la convention de Genève sera le seul cadre juridique international à moins qu'il y ait une nouvelle résolution de l'ONU". A ses yeux, les États-Unis, "en tant que puissance occupante" doivent se contenter de "gérer les décisions administratives au jour le jour". Voilà qui semble bien naïf. Les États-Unis ne se sont pas engagés dans cette guerre pour se contenter ensuite de régler les problèmes d'intendance d'une occupation militaire. C'est même plutôt le genre de tâches qu'ils préféreraient abandonner à des tiers, pour se concentrer, eux, sur des activités plus substantielles: prendre le contrôle de réserves de pétrole qui attirent d'autant plus les convoitises qu'elles sont bien identifiées.

Jusqu'à présent, la vente de pétrole irakien était encadré par les résolutions de l'ONU et notamment le programme "Pétrole contre nourriture". Les spéculations vont donc bon train sur la manière dont les États-Unis vont s'y prendre pour relancer la production. Etant donné que, jusqu'à présent, les installations pétrolières ont été très peu endommagées par la guerre, les États-Unis pourraient, dans un premier temps, relancer assez vite la production à son niveau d'avant-guerre.

Et ce n'est certainement pas l'absence d'un blanc-seing de l'ONU et d'une nouvelle résolution attendue par les autres pays du Conseil de sécurité qui empêchera les compagnies pétrolières américaines d'essayer de mettre la main sur l'essentiel du brut irakien. D'ailleurs, c'était déjà le cas avant que cette guerre ne commence. Officiellement, les compagnies pétrolières américaines n'étaient pas présentes sur le marché irakien, mais c'est quand même elles qui en achetaient la plus grande part, en rachetant le brut irakien par le biais d'intermédiaires.

Alors, on voit mal pourquoi les États-Unis, vainqueurs dans cette guerre, ne tireraient pas le profit maximum d'un nouveau rapport de forces encore plus nettement en leur faveur.

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