Aussaresses exécuteur des basses oeuvres des gouvernements français27/02/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/02/une1804.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Aussaresses exécuteur des basses oeuvres des gouvernements français

Aussaresses, coordinateur des services de renseignement à Alger en 1957 et donc l'un des responsables de la torture pendant la guerre d'Algérie, avait poursuivi ensuite tranquillement sa carrière militaire. Il a fallu attendre la publication de ses mémoires, publiés en mai 2001, Services spéciaux, Algérie, 1955-1957, pour que la justice s'intéresse à ses exactions.

Le procès en appel d'Aussaresses vient de prendre fin. L'avocate générale a repris l'argumentation déjà utilisée pour le premier jugement, en janvier 2002, qui l'a condamné à 7 500 euros d'amende. Il lui est reproché d'avoir utilisé dans son récit un ton "froid, détaché, volontairement dépourvu d'appréciation morale". L'accusation déplore aussi un "effort de banalisation des faits", justifiés au nom de "l'accomplissement du devoir militaire, d'un patriotisme sans faille".

Bref, il aurait mieux fait de s'abstenir de raconter son "travail" qui lui a valu de finir confortablement sa carrière de militaire avec le grade et la retraite de général. Les atrocités, tortures, exécutions sommaires qu'il déclare avoir commises, constituaient le quotidien de la guerre d'Algérie qui ne fut d'ailleurs pas désignée comme telle, mais comme une opération de police. Les militaires tels qu'Aussaresses poursuivaient ce qu'ils avaient déjà pratiqué en Indochine de 1946 à 1954 ou encore à Madagascar en 1947 et les années suivantes, c'est-à-dire une répression impitoyable qui fit des centaines de milliers de morts parmi les habitants.

Ces guerres coloniales elles-mêmes, destinées à maintenir des populations entières dans l'oppression politique et économique, s'inscrivaient dans le prolongement des pratiques du colonialisme ordinaire. Toute l'histoire de la colonisation n'est que pillages et massacres exécutés en toute impunité par l'armée dont la tâche officielle était, comme cela fut dit en Algérie entre 1954 et 1962, de "pacifier" les territoires. Et puisque la dénonciation des dictatures est à l'ordre du jour, il ne faudrait pas oublier le régime imposé à leurs colonies par les puissances colonisatrices, qui se considéraient par ailleurs comme des démocraties modèles.

Aussaresses a été un des nombreux exécutants des basses oeuvres de l'impérialisme français que tous les dirigeants politiques de droite comme de gauche -que ce soit entre autres Edgar Faure, Guy Mollet, Mitterrand ou de Gaulle- ont servi fidèlement en donnant carte blanche à l'armée pour qu'elle préserve les intérêts des colons et des sociétés qui bénéficiaient de cette situation.

Si Aussaresses est effectivement un tueur, un bourreau, ainsi qu'il s'en vante, il est surtout un rouage de l' Etat, un homme d'ordre dont les bons et loyaux services ont été reconnus et récompensés. Aussaresses se dit n'être qu'un exécutant, faisant salement un sale boulot. Mais les donneurs d'ordre, les décideurs n'ont jamais été, eux, convoqués par les tribunaux. Et pourtant, ils l'auraient mérité. Pendant le même temps, lorsque Aussaresses torturait, des jeunes appelés désertaient pour ne pas partir en Algérie et ne pas participer aux exactions. Eux durent s'exiler pendant des années pour fuir la répression.

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