Valmer-Samsic (Air France-Le Bourget) : Une grève qui a payé13/02/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/02/une1802.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Valmer-Samsic (Air France-Le Bourget) : Une grève qui a payé

Après trois jours de grève dynamique, soutenus activement par les travailleurs d'Air France, les salariés de la société sous-traitante de nettoyage Valmer-Samsic ont obtenu les trois quarts de ce qu'ils demandaient.

Cette entreprise de nettoyage, qui a des chantiers sur toute la France, compte en région parisienne plusieurs centaines de salariés répartis sur une dizaine de chantiers environ. Parmi ces derniers, il y a Air France : à Roissy, à Orly et au Bourget. Comme toutes les entreprises de nettoyage, Valmer-Samsic dépend d'une des Conventions collectives nationales les plus basses (celle de la Propreté), et n'hésite pas à imposer des conditions de travail et de rémunération tout à fait scandaleuses.

Sur le site d'Air France Le Bourget, par exemple, plus de la moitié des 17 personnes (en majorité des femmes) qui travaillent pour Valmer ne gagnent que 7,31 euros brut de l'heure et plusieurs sont en temps partiel, non par choix mais parce que la direction le leur a imposé. Avec plus de 20 ans d'ancienneté, certaines n'ont même pas l'équivalent de 7 000 F mensuels pour vivre. Les horaires de travail, pour beaucoup d'entre elles, sont en deux parties, c'est-à-dire qu'elles doivent venir, parfois de loin, de 6 h à 9 h, puis revenir de 17 h à 20 h. Les vêtements de travail sont donnés au compte-gouttes, certaines personnes n'ont eu qu'une dotation en dix ans ! La plupart n'ont pas de vêtements chauds, alors qu'elles doivent sortir des locaux plusieurs fois par jour pour se rendre dans les secteurs à nettoyer.

À ces conditions, il faut ajouter le mépris dont fait preuve envers eux la responsable d'Air France chargée des relations avec la sous-traitance. Cette responsable illustre bien la politique de la direction d'Air France vis-à-vis des sous-traitants : régulièrement, la direction lance des appels d'offre pour toutes les prestations qu'elle sous-traite. Elle cherche ainsi les tarifs les plus bas possible... " pour diminuer les coûts de la compagnie "... et les entreprises sous-traitantes qui obtiennent le marché répercutent sur leurs salariés le serrage de vis imposé par " le client ". C'est l'entente du client et du prestataire contre les travailleurs.

La grève a éclaté parce que les travailleurs de Valmer du chantier Air France Le Bourget n'ont pas eu de prime de fin d'année, contrairement à leurs camarades de Roissy Siège (qui ont touché 5 500 F fin 2002) et à ceux du Terminal F.

Mi-janvier, les 17 personnes se sont réunies et ont fait une lettre à leur direction, signée de tous, pour demander : une prime de fin d'année de 5 500 F, l'augmentation du salaire, l'attribution des primes qu'elles n'ont pas, des vêtements de travail et la transformation des temps partiel en temps plein. Elles donnaient dix jours à la direction pour répondre. Celle-ci ayant fait la sourde oreille, le lundi 3 février elles ont décidé toutes ensemble de se mettre en grève et d'aller, dès le lendemain, expliquer les raisons de leur grève au personnel Air France dans les ateliers du Bourget.

La direction de Valmer ne pensait pas que ces quelques personnes allaient protester bien longtemps, ni qu'elles feraient beaucoup de bruit... C'était sans compter sur la solidarité et le soutien des travailleurs d'Air France et des militants syndicaux de la CGT. Valmer tenta alors de briser la grève en faisant faire le nettoyage et le vidage des poubelles par le responsable de site et quelques acolytes. Mais chaque fois, des travailleurs d'Air France venaient prévenir les grévistes, et ceux-ci arrivaient pour dénoncer l'attitude de ce responsable de site, ou carrément pour bloquer les entrées comme ce fut le cas un soir où le directeur et trois cadres prétendaient rentrer dans les locaux... Ce soir-là, c'est finalement le responsable de la sûreté Air France Le Bourget qui renvoya ces " briseurs de grève " pour éviter les incidents.

Le mercredi 5 février, c'est dans le hangar militaire que le responsable de Valmer entra, sans autorisation, avec la complicité de la responsable des services généraux d'Air France (comme quoi quand on est briseur de grève, les portes les plus hermétiques s'ouvrent sans les badges sophistiqués qu'on nous présente comme " obligatoires ", aux yeux des protagonistes de Vigipirate et autres balivernes). Le hangar étant entouré de grilles, des ordures furent jetées au responsable de site à travers celles-ci aux cris de : " Puisque t'aimes ramasser la merde, tiens en revoilà !"

Le personnel d'Air France était solidaire de cette grève, faite par les plus démunis des travailleurs de la plate-forme aéroportuaire, et s'apprêtait même à faire un débrayage de soutien. C'est sans doute le risque de perturbation à Air France-même qui a poussé la direction de Valmer à venir négocier, dès le jeudi, et au milieu des grévistes, au local CGT, en présence de délégués syndicaux d'Air France...

Le soir, il cédait une prime de fin d'année de 4 500 F en 2003 versée en 12 fois, ensuite 5 000 F fin 2003 et 5 500 F fin 2004. Il cédait l'augmentation d'un échelon pour les 12 personnes les plus mal payées. Il s'engageait à livrer des vêtements de travail en nombre suffisant et payait 70 % des heures de grève.

Les grévistes ont fêté ce résultat dans la foulée, qu'eux et tous les travailleurs d'Air France ont ressenti comme une victoire.

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