La colère des salariés d'Air Lib13/02/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/02/une1802.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La colère des salariés d'Air Lib

Pour les 3 200 salariés d'Air Lib, la fin de ce qu'on a appelé le " feuilleton Air Lib ", c'est la perte d'emploi à coup sûr.

Ils se sont mobilisés pour crier leur colère, écoeurés et révoltés.

Chaque matin, ils sont de 1 000 à 2 000 à se réunir en assemblée générale sur le parking d'Orly. Ils partent ensuite en manifestation pour occuper les halls et faire appel à la compréhension et à la solidarité des voyageurs, l'accès aux pistes leur étant interdit depuis le 7 février, par des CRS qui les encadrent et s'inquiètent d'éventuels débordements (ce qui se règle d'ailleurs par quelques jets de lacrymogène). Le 10 février après-midi, toujours aux cris d'" Air Lib en colère, y en a marre de la galère ", ils ont bloqué la nationale 7.

Quelques jeunes flics en civil essayent aussi de se mêler aux manifestants mais ils sont vite repérés car leur style " loubard " tranche au milieu des salariés d'Air Lib, qui, des pilotes aux hôtesses en passant par les personnels aux sol, sont tous en uniformes professionnels.

Chaque jour, ils ont la visite de notables locaux et d'élus, comme Hélène Luc, sénateur PCF ou Marie-Noëlle Lienemann, ex-maire d'Athis et ex-ministre socialiste. Cela remonte le moral, certes, mais bien peu ont d'illusions sur l'efficacité de leurs interventions. " Sauver l'emploi sur Orly ", obtenir la " réactivation de la licence d'exploitation ", oui, mais comment ? Sûrement pas en comptant sur tous ces officiels qui ont quand même, ne l'oublions pas, cautionné année après année, de plans sociaux en plans sociaux, une politique gouvernementale hostile aux intérêts des salariés.

Mais chaque jour aussi, l'indignation, la colère face au sort qu'on leur réserve, monte d'un cran. Beaucoup réalisent que ce n'est pas sur les promesses de leur direction et du gouvernement qu'il faut compter. Les tables rondes où ont été conviés des responsables de la SNCF, d'Air France, ou ADP et autour desquelles on fait semblant de trouver des reclassements pour ces 3 200 " laissés-pour-compte ", ont encore plus fait monter la pression. Ce n'est pas être reclassés qu'ils veulent, c'est garder leur emploi ! D'autant que tout le monde sait très bien ce qu'il est advenu des 1 400 licenciés de 2001 : 70 pilotes du plan de restructuration de l'époque n'ont rien retrouvé, SNCF n'a absorbé que quelques dizaines de personnes, même chose chez ADP et Air France qui s'était engagée à intégrer dans ses rangs plusieurs centaines d'ex-AOM-Air Liberté mais a trouvé l'excuse des attentats du 11 septembre pour " geler " toute nouvelle embauche, ce qui fait que sur les 600 promesses plusieurs dizaines attendent toujours...

Mardi 11 février, c'est au ministère des Transports que se sont rendus les " Air Lib en colère " où deux délégations devaient être reçues : l'une formée de représentants politiques, drapés de tricolore officiel, et accueillis par Gilles de Robien, le nouveau ministre, et une autre, formée de représentants des syndicats, reçue par une sous-fifre du ministre.

De 10h30 jusqu'à 15h, tout le monde a poireauté dans une ambiance assez surchauffée et révoltée. Les manifestants qui s'étaient avancés jusque sur le trottoir-même du ministère, n'ont vraiment pas apprécié l'intervention des policiers et ont réagi. Après un sit-in et quelques incidents qui ont déchaîné encore plus d'indignation, la journée s'est terminée devant le siège d'ADP qui bloque les avions d'Air Lib sur les pistes d'Orly et se préoccupe beaucoup plus de ce que lui doit Corbet, le PDG endetté d'Air Lib, que du sort des salariés. Comme Air France d'ailleurs, plus attentive à récupérer les " slots " (les créneaux horaires libérés par la disparition d'Air Lib) qu'à reclasser les travailleurs jetés aux orties. Air France, dont la privatisation devait être discutée au Sénat le 12 février.

Les Air Lib comptaient bien s'y inviter et s'y faire entendre.

Partager