Irak : Mensonges et intoxication24/01/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/01/une1799.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Mensonges et intoxication

Après deux mois passés sur le terrain, en Irak, les inspecteurs de l'ONU en sont toujours au même point - pas la moindre " arme de destruction massive " à l'horizon. Mais cela n'empêche pas pour autant les leaders occidentaux et les médias aux ordres de commencer à parler de " preuves ".

Ainsi, au cours de la semaine du 13 au 19 janvier, une quinzaine d'ogives de roquettes trouvées vides dans un coin de hangar ont-elles été promues au rang d' " armes chimiques possibles ", sans la moindre preuve qu'il s'agisse d'autre chose que de débris abandonnés, comme en produisent toutes les armées du monde. Peu après, 3 000 pages de documents traitant de la production d'uranium enrichi sont devenues la "<|>preuve possible " de l'existence d'un programme d'armement nucléaire. Peu importe que ces documents aient été trouvés dans la bibliothèque privée d'un physicien dont c'est justement la spécialité et qu'ils aient été connus de longue date des experts de l'ONU !

Il n'en a pas fallu plus aux leaders anglo-américains pour monter le ton en affirmant que désormais "le temps est compté" pour l'Irak. Ce sur quoi les médias n'ont pas manqué de renchérir. La presse et les journaux télévisés ont mis à la une ces " preuves possibles ". Elles ont été montées en épingle et dûment dramatisées, pour compenser leur peu de crédibilité, tandis que de soi-disant " experts " du Moyen-Orient dissertaient sur ce qu'ils appellent la duplicité du régime irakien.

Et il ne s'agit sans doute encore là que d'un début. Par exemple, l'Irak vient de refuser d'autoriser des avions-espions américains U2 à sillonner librement son espace aérien. Et on comprend bien pourquoi : Bagdad a de bonnes raisons de ne pas vouloir ouvrir ce qui lui reste d'espace aérien (l'ONU lui en a confisqué de fait les deux tiers après la guerre du Golfe) à l'armada anglo-américaine de plus en plus menaçante qui est installée à ses portes. Mais cela n'empêchera sans doute pas ce refus d'être bientôt présenté comme une " preuve " du fait que le régime cherche à cacher quelque chose, voire comme une contravention à la résolution 1441 du Conseil de sécurité qui pourrait justifier des mesures de rétorsion militaires.

Alors oui, ce cirque politicien et médiatique autour des prétendues " armes de destruction massive " que détiendrait l'Irak n'est qu'une vaste duperie et un tissu de mensonges. L'Irak est un pays pauvre, dont l'économie a été de surcroît virtuellement détruite par la guerre du Golfe et les douze années de sanctions qui l'ont suivie. Comment faire croire aux populations américaines et européennes que ce pays puisse constituer un danger tel qu'il justifie le déploiement guerrier actuel dans le Golfe, voire une aventure militaire dans la période à venir, sinon en recourant à ce genre de mensonges et d'intoxication ?

Une telle campagne d'intoxication n'a rien de nouveau. Une émission récemment programmée à la télévision sur Arte a montré comment les " preuves " du danger irakien avaient été fabriquées de toutes pièces par les services spéciaux américains au cours de la préparation de la guerre du Golfe. Et, par la suite, il y a eu bien d'autres campagnes d'intoxication orchestrées par les gouvernements avec l'aide des médias, en particulier sur la " menace terroriste " irakienne, pour contrecarrer l'indignation d'une partie de l'opinion publique occidentale face aux souffrances imposées à la population irakienne par les sanctions économiques.

En attendant, Bush continue à préparer son aventure guerrière contre l'Irak. On assiste à l'accélération du déploiement militaire dans le Golfe, avec l'annonce, depuis la mi-janvier, de l'envoi de nouveaux contingents de 37 000 soldats américains et de 26 000 soldats anglais. En même temps, la campagne de mensonges et d'intoxication complaisamment reprise par les médias, y compris en France, sert à entretenir un climat de guerre et à habituer l'opinion publique occidentale à l'idée de son inéluctabilité.

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