Les licencieurs, des voyous protégés par Chirac et Sarkozy09/01/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/01/une1797.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Les licencieurs, des voyous protégés par Chirac et Sarkozy

La chasse aux voyous est à la mode en France. Au niveau gouvernemental, Chirac a condamné les " voyous des mers ". Sarkozy s'est institué chasseur en chef des voyous des banlieues, c'est ainsi qu'il qualifie, en vrac, les quelques jeunes coupables d'incivilités, ou même de violences, et ceux qui traînent, faute de mieux, dans les halls d'immeubles des cités populaires.

Mais il y a des voyous dont on parle beaucoup moins, sauf dans les échos mondains et financiers. Et pourtant, ils sont bien connus. Ils ne sont pas, eux, hors d'atteinte, au-delà des eaux territoriales, dans des zones de non-droit. Ils fréquentent les salons et parfois les réceptions officielles, les antichambres des ministères et les couloirs des assemblées. Ils côtoient élus et ministres.

Ce sont ces patrons qui exploitent les travailleurs, et puis lorsqu'ils les estiment pas assez rentables, qui les jettent à la rue. Ce sont des gens qui, pour la plupart pour ne pas dire tous, ont bénéficié de la généreuse bienveillance, sonnante et trébuchante, des gouvernements quelle que soit leur couleur, mais aussi des instances locales, conseils régionaux, généraux, municipalités des grandes villes ; que ce soit sous forme des primes d'aide à l'emploi, ou des diverses formes d'exonération fiscale.

Parmi eux, il y a ceux qui, assurés d'une impunité quasi certaine et des complicités des gens du même monde qu'eux, s'évaporent en laissant derrière eux une ardoise substantielle, comme la direction de Daewoo en Lorraine. Ils laissent du même coup des centaines de femmes et d'hommes sans travail, sans salaire. Il y a ce patron d'une petite entreprise de parfumerie de Seine-Maritime, qui s'est enfui comme un vulgaire cambrioleur, vidant l'entreprise des machines, tandis que les salariés, rentrant de leur semaine de congé après les fêtes, retrouvaient leur usine vidée, sans autre forme d'explication. Des exemples de la sorte, on pourrait en citer des dizaines chaque semaine, des centaines, voire plus dans l'année.

Et au bout il y a le flot des millions de sans-travail, ceux qui sont officiellement recensés et ceux qui ne le sont pas ou plus.

Il y a les quelques patrons qui dépassent parfois les bornes de la loi (encore que la loi soit bonne fille à leur égard) mais il y a aussi, et c'est le cas général, tous ceux qui restent dans le cadre de la légalité, voyous patronaux de petite envergure ou voyous de haut vol, qui ont leur nom dans le gotha des affaires, et qui figurent dans les rubriques boursières, les Michelin, Alstom, Moulinex et autres Philips ou Alcatel. Ils trafiquent en Bourse, ils trafiquent leur comptabilité, mais surtout ils jouent en toute impunité avec le sort de centaines de milliers de femmes et d'hommes dans ce pays comme ailleurs de par le monde. Ils décident souverainement en restant dans le droit, de licencier, saccageant des vies, des familles, des villes et des régions entières, en privant de ressources ceux qui y vivaient laborieusement, et du même coup assèchent l'activité économique de toute une région.

Oui, parmi toutes les catastrophes dont on a parlé ces temps ci, il y en a une qui ne fait pas la Une des journaux ni l'objet de débats, tant pour les journalistes et les politiciens elle est banale. Pire même, elle est considérée comme normale, et pour certains même, nécessaire à la bonne vie de " leur économie ". Cette catastrophe, c'est le chômage, régulièrement alimenté par les plans de licenciements, bien plus fréquents que les marées noires, mais bien plus nocifs encore.

Eh bien, il est aussi urgent d'empêcher ces voyous sociaux que sont les capitalistes de continuer de nuire à la collectivité.

Mais dans ce domaine, on aurait bien tort - encore plus que contre les pollueurs des mers et du littoral - de compter sur les Chirac et les Sarkozy pour leur faire la chasse.

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