Plus d'un an après l'explosion d'AZF, 15 jours de grève à la SNPE15/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1789.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Plus d'un an après l'explosion d'AZF, 15 jours de grève à la SNPE

Plus d'un an après l'explosion d'AZF, le 21 septembre 2001, aux centaines de travailleurs licenciés chez les sous-traitants ou dans les entreprises avoisinantes vont s'ajouter ceux du pôle chimique qui n'acceptent pas les mutations internes chez Total ou dans la SNPE.

À la SNPE

Dans cette entreprise où l'État est le principal actionnaire, seuls 150 salariés sur 620 sont concernés par le maintien des activités dans deux filiales, autour des activités « perchlorate » et « spatial ». Le plan social négocié par les syndicats ressemble à celui d'AZF (départ en préretraite pour les plus de 50 ans, mutations et cellule de reclassement pour les autres). Cela ne suffisant pas, la SNPE a été bloquée par des piquets de grève, du 24 octobre au 7 novembre. Les syndicats réclamaient un engagement de la direction sur la « pérennité des activités restantes pour 10 ans » et une « prime de préjudice » non chiffrée. Le mouvement a été massivement suivi par les travailleurs.

Durant tout le long week-end de la Toussaint, ils se sont relayés, jour et nuit, pour alimenter le feu de palettes et de pneus qui signalait leur présence aux Toulousains et surtout à leur direction. Devant l'usine on pouvait lire des slogans où les salariés s'en prenaient directement à leurs dirigeants et à travers eux à l'État.

L'union sacrée entre syndicats et direction, qui était de mise ces derniers mois, semblait bel et bien enterrée ! La direction a d'ailleurs contre-attaqué en demandant à la justice de trancher par référé sur le blocage de l'usine. Une assignation à comparaître le 7 novembre devant le tribunal a été envoyée à chaque représentant syndical.

Entre-temps, et contrairement à AZF, aucune organisation syndicale n'a donné d'avis favorable sur le plan social proposé lors du CCE du 5 novembre. D'ailleurs, au cours de l'assemblée générale du même jour, l'ensemble du personnel, après un vote à main levée, reconduisait la grève à l'unanimité. La direction de la SNPE n'a finalement lâché que 2000 euros de prime. Quant aux jours de grève, la direction proposait de les retenir sur les congés payés. Pour la direction de la SNPE, comme pour la direction de Total, pas question de garantir l'emploi de tous. Cela a été pris par une grande partie des salariés pour une aumône scandaleuse.

Le 7 novembre au matin a eu lieu le référé en présence des salariés en grève. La direction tentant par cette manoeuvre du référé d'essayer de briser la grève avec l'aide de la justice.

Mais lors de l'assemblée générale de ce même jour, en présence du responsable CGT d'AZF (c'était la première fois qu'on le voyait depuis le début du blocage), le représentant CGT de la SNPE a expliqué, avec une argumentation digne d'un patron, que l'action avait atteint ses limites et qu'il fallait lever les barrières et reprendre le travail... même s'il n'y avait plus de travail pour la plupart. Il a réussi à convaincre 60 % des présents qu'il n'y avait plus rien à faire. Et c'est la rage au coeur que bien des travailleurs ont levé le blocage.

À Grande Paroisse (AZF)

À partir du 18 novembre, une centaine de travailleurs seront affectés à « la cellule de reclassement », c'est-à-dire pas très loin de l'ANPE. A partir de cette date, ils devront être présents deux demi-journées par semaine. Pour l'instant, cette cellule de reclassement n'a fait aucune proposition sérieuse. Elle n'a à son actif qu'un repas pris par paquets de 25 dans un restaurant proche, avec la direction de l'usine (un cadre par table), pour convaincre les travailleurs qu'on s'occupait d'eux.

Aucun syndicat, que ce soit à AZF (à part le syndicat FO minoritaire) ou à la SNPE, ne s'en est pris à Total pour qu'il assume toutes les conséquences de l'explosion dont il est responsable. Les plans sociaux sont finalement passés, laissant sur le bord du chemin une partie des personnels. Les salariés, trompés par la politique fausse de certains syndicalistes, ont été divisés entre eux, coupés de la population sinistrée. Ils vont continuer de payer une explosion dont ils seront une seconde fois les victimes.

Et la population sinistrée

Selon les chiffres officiels de la mairie, il reste encore dix-huit familles logées en mobile-homes et menacées de passer un deuxième hiver dans des conditions scandaleuses, 10 % du parc HLM sinistrés n'ont pas encore été réparés. Quant aux tracasseries administratives ou judiciaires pour faire valoir ses droits en matière de malfaçons dans les réparations ou même d'évaluation des dégâts, elles pourrissent la vie de centaines de familles des quartiers populaires. Vis-à-vis des milliers de blessés, Total, ses assureurs et autres experts font tout leur possible pour utiliser le labyrinthe administratif et retarder l'indemnisation. Ainsi, un an après, seule une vingtaine de dossiers aurait été « soldée », d'après les représentants de Total eux-mêmes.

Au bilan, plus d'un an après l'explosion, Total et l'État s'en sortent plutôt bien. Les gros actionnaires s'en tirent avec quelques faux frais, quelques procès, mais les affaires peuvent continuer... jusqu'au prochain Erika ou AZF. Quant à l'État, il pourra faire semblant de voter de pseudo-lois devant protéger la population et l'environnement, mais qui, en réalité, ne protègeront que les intérêts des industriels.

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