Attaque contre les retraites : Le coup d'envoi est donné15/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1789.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Attaque contre les retraites : Le coup d'envoi est donné

Les arguments utilisés pour justifier les prochaines attaques contre les retraites ne sont pas nouveaux mais martelés sur tous les médias, ils se veulent définitifs, irréfutables. C'est vite dit !

Tous s'appuient sur des données réelles comme le déséquilibre démographique. Sauf que l'argumentation gouvernementale part du principe que ce serait au monde du travail de payer. Il obéit en cela à la seule logique du patronat.

« Trop de retraités ? et pas assez d'actifs ? »

Le nombre de retraités devant augmenter considérablement entre 2006 et 2040, Medef et gouvernement en profitent pour contester le système par répartition, affirmant qu'il n'y aura pas assez d'actifs pour financer les retraites. Outre le fait que de telles prévisions démographiques sur un temps aussi long sont aléatoires, l'argument se fonde sur une situation où le chômage se perpétue. Si, au lieu d'empocher les subventions et de multiplier les plans de licenciements, le patronat embauchait, si le gouvernement résorbait le chômage par une politique de plein emploi dans les services publics, si les salaires étaient plus élevés, les caisses pourraient être renflouées par l'augmentation automatique des rentrées liées aux cotisations salariales. Et puis quelle sera la situation économique du pays d'ici dix, quinze, vingt ou trente ans ? Personne n'en sait rien, pas plus ceux qui, aujourd'hui, pronostiquent la faillite des caisses de retraites. Et c'est faire fi des gains de productivité considérables de ces quarante dernières années. Les propos alarmistes d'aujourd'hui visent à conditionner la population.

« Plus d'argent dans les caisses » ? Qu'on en cherche ailleurs !

Laisser la situation en l'état, c'est courir à la catastrophe, s'exclament en choeur les spécialistes plus ou moins qualifiés. Ces arguments oublient que des milliards d'euros sont dilapidés chaque jour sur les marchés financiers et engloutis dans la spéculation boursière. Patronat et gouvernement omettent de parler des richesses accumulées pendant des décennies dans les coffres-forts des actionnaires. Ils prétendent que l'augmentation à venir du nombre de retraités signifierait une augmentation de 4 % des richesses produites par les actifs et qu'on ne pourra y faire face. Mais en quoi une telle augmentation serait-elle insurmontable ? Entre 1960 et 2000, la part des retraites dans les richesses produites est passé de 4 à 12 %. Le régime de retraite par répartition n'a pas fait faillite, que l'on sache !

Et puis au nom de quels principes le monde du travail devrait-il être le seul à supporter le poids des futures retraites ? Si solidarité il doit y avoir, elle doit impliquer toutes les couches de la société, à commencer par celles qui sont les plus fortunées. On pourrait mettre à contribution Mme Bettancourt, l'une des premières fortunes de France, prendre sur les profits de la famille Peugeot, de Bouygues ou de TotalFinaElf. Ce ne serait qu'un juste retour des choses ! Le gouvernement utilise bien l'argent de nos impôts pour subventionner le patronat ou pour mener ses entreprises guerrières en Côte-d'Ivoire, et peut-être demain en Irak !

« La justice ? » 37,5 ans de cotisations pour tous !

Les champions de la remise en cause de la retraite des salariés de la fonction publique invoquent « l'équité ». Les fonctionnaires seraient privilégiés par rapport aux salariés du privé. Il faudrait donc aligner le nombre d'années de cotisations sur les plus défavorisés.

Cet argument est aussi malhonnête que les autres. Faut-il rappeler qu'avant la réforme de Balladur, en 1993, les salariés du privé comme du public cotisaient 37,5 années pour partir à la retraite, à taux plein, à 60 ans ? Balladur a allongé la durée de cotisation pour les salariés du privé, la faisant passer de 37,5 à 40 ans. Première attaque qui fut aussitôt suivie par une seconde : le calcul de la retraite ne se faisait plus sur les dix mais les vingt meilleures années ; ce qui revenait à baisser le montant de la retraite. En 1995, Juppé tenta d'aligner le public sur le privé, mais il se heurta à la grève des cheminots. La justice voudrait, à l'inverse, que le privé revienne aux 37,5 ans de cotisation et s'aligne de nouveau sur le public.

« Les fonds de pension ? » L'arnaque du siècle !

Enfin, patronat et gouvernement reviennent à la charge avec les fonds de pension « à la française ». Voilà qui n'est guère convaincant... au moment où les faillites succèdent aux faillites. Les scandales d'Enron et de WorldCom aux États-Unis rappellent que les fonds de pension, quelle que soit la forme qu'ils prennent, permettent toutes les escroqueries. Les dirigeants d'Enron, malgré la faillite, sont partis avec le magot, tandis que les dizaines de milliers de salariés, dont la retraite était liée au cours des actions de l'entreprise, n'ont plus que leurs yeux pour pleurer. Cette « recette miracle » vise à drainer des millions d'euros pour permettre aux compagnies d'assurances de spéculer en Bourse. Tel est le but de la retraite par capitalisation. Si, demain, la part de la retraite par capitalisation augmentait au détriment de la retraite par répartition, ce serait la porte ouverte à une retraite à deux niveaux pour l'ensemble du monde du travail : ceux qui auraient les moyens d'y souscrire - avec les risques que tout s'effondre - et ceux qui, n'en ayant pas les moyens, devraient se satisfaire d'une retraite réduite à la portion congrue.

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