Le " bazar " de la décentralisation08/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1788.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le " bazar " de la décentralisation

C'est le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, un des leaders de la droite et un proche de Chirac, qui vient de s'opposer à la folie décentralisatrice qui s'est emparée de Raffarin et de ses ministres en dénonçant... " l'intégrisme décentralisateur " !

Debré apparemment connaît bien son monde, les députés et toute la caste des élus locaux, présidents de Conseils généraux et régionaux, élus des départements et des régions, maires des grandes villes, tous ces féodaux du système, qui n'ont qu'un très faible sens de l'intérêt général, même quand il s'agit des intérêts généraux de la bourgeoisie. C'est ainsi qu'il a exprimé sa crainte sur les " féodalités irrespectueuses de la loi " qui pourraient se croire tout permis dans le cadre des réformes envisagées par Raffarin, avec " les distorsions entre les territoires ", " les doublons et les gaspillages ". La décentralisation, a-t-il affirmé, " ce n'est pas le bazar ! Ce n'est pas une grande braderie qui laisserait la République en morceaux ".

Tous ces élus, ses élus faudrait-il dire pour Debré, sont les obligés de tous les patrons et bourgeois profiteurs locaux, qui ont comme seule morale la soif du profit à tout prix, et les moyens de s'en mettre plein les poches le plus vite possible. Certes, c'est la morale de l'ensemble du patronat et de la bourgeoisie, grande comme moins grande, mais la courte vue des patrons individuels peut amener à une situation incontrôlable. L'appareil d'État, les hauts fonctionnaires et le haut personnel politique voudraient bien pouvoir maintenir un certain ordre. Debré semble craindre que les gens de son monde, laissés à eux-mêmes, fassent n'importe quoi, essayant au passage de se bâtir des féodalités où ils seraient les seuls maîtres, et pillant à leur guise les budgets mis à leur disposition.

" Prenons garde à ce que cela ne conduise l'État à être dépossédé subrepticement des missions relatives à la cohésion nationale ", ajoute Debré. Précisant même, pour ceux qui n'auraient pas encore compris, qu'il ne faut pas que " chacun se sente autorisé à bâtir sa petite république sur son propre territoire ", ni que ce soit la fin " de la conception de la solidarité, de l'égalité et de la fraternité au coeur de notre pacte social ". Un autre député de la majorité de droite, proche de Chirac, a exprimé les mêmes craintes, celles, a-t-il précisé, de voir s'installer des roitelets aux commandes des exécutifs locaux, sous prétexte de décentralisation.

Les dirigeants politiques à la mode de Debré, si prompts à condamner à l'extérieur " les républiques bananières " et les potentats corrompus de bien des pays sous-développés, savent qu'ils n'ont guère à attendre mieux de leur propre caste politique, ici en France. Alors on peut faire confiance à cet expert et connaisseur quand il juge les siens.

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