Massu, un homme de main de la bourgeoisie01/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1787.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Soudards

Massu, un homme de main de la bourgeoisie

Mort le 26 octobre, le général Massu, ce " fidèle du général de Gaulle ", aurait eu sur le tard un accès de repentance. Pris de " remords ", il aurait exprimé des " regrets " quant à la torture pratiquée pendant la guerre d'Algérie. Mais cette image de " gentil vieillard " et de " général repenti " qu'on nous présente, aujourd'hui, en laissant croire que la guerre d'Algérie ne fut qu'un simple intermède dans la vie de Massu, occulte pas mal de choses.

Massu était un général réactionnaire, comme l'ensemble de ses pairs de l'état-major français. Il commença ses classes dans la Coloniale, l'un des secteurs les plus traditionalistes de l'armée. Tout au long de sa carrière, il fut - en bon professionnel - l'exécuteur des basses oeuvres du pouvoir politique, défendant les intérêts de la bourgeoisie française aux quatre coins de la planète, par tous les moyens les plus barbares.

Débutant sa carrière comme capitaine d'une compagnie de tirailleurs sénégalais au Tchad, où il contribua à " maintenir l'ordre ", il rallia, la guerre venue, les généraux Leclerc et de Gaulle. Lieutenant-colonel à la Libération, il partit ensuite en Indochine pour tenter de mater l'insurrection nationaliste vietnamienne. A son retour, il devint parachutiste et exerça ses talents lors de l'intervention franco-anglaise, décidée en réaction à la nationalisation par Nasser du canal de Suez, en 1956. Mais c'est en Algérie qu'il allait donner toute la mesure de ses capacités ! Ce pays fut bientôt le théâtre d'exactions et de massacres commis par l'armée française pendant les huit ans que dura la sale guerre, de 1954 à 1962. Massu, Aussaresses, Bigeard et des centaines d'autres militaires s'y distinguèrent.

En mars 1956, députés socialistes et communistes votèrent les " pouvoirs spéciaux " à Guy Mollet, ouvrant ainsi la voie à l'intensification de la guerre d'Algérie. Quelques mois plus tard, en janvier 1957, le général Massu fut chargé du " maintien de l'ordre à Alger " où il était secondé par Aussaresses. C'est à cette époque, de février à juin 1957, pendant la " Bataille d'Alger ", que la torture, qui existait depuis fort longtemps sous le colonialisme, devint une pratique courante et tout à fait ordinaire. Massu et ses sbires de la 10e compagnie de parachutistes y décrochèrent leur sinistre réputation de tortionnaires, faisant régner l'arbitraire le plus total à Alger. Tortures, assassinats, disparitions se multiplièrent, comme celle de Maurice Audin, jeune militant communiste et militant contre la guerre d'Algérie, solidaire de la lutte pour l'indépendance de ce pays. La guerre finie, Massu continua sa carrière dans l'armée. Juste avant de prendre sa retraite, il garantit le soutien de l'armée à de Gaulle venu le consulter à Baden-Baden, en Allemagne, où stationnait une partie de l'armée française lors des événements de mai-juin 1968.

La bourgeoisie française enterre l'un de ses hommes de main, mort de vieillesse dans son lit. Le gouvernement, Chirac en tête, tresse une couronne de lauriers à ce général tortionnaire, le présentant comme un " grand soldat ". Mais ce concert de louanges ne saurait faire oublier le sang qu'il a sur les mains. Ces gens-là ont les héros qu'ils méritent.

Partager