Après Aubry, Fillon organise la précarité de l'emploi des jeunes01/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1787.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Après Aubry, Fillon organise la précarité de l'emploi des jeunes

Le ministre des Affaires sociales François Fillon l'a annoncé, les emplois-jeunes vont disparaître et devraient être remplacés par des " contrats jeunes en entreprise ". Tout comme les précédentes, cette nouvelle version de l'emploi précaire des jeunes devrait s'accompagner de généreuses exonérations de charges sociales pour les patrons, sous prétexte, une fois de plus, de les inciter à embaucher à moindre coût... sans plus d'efficacité probablement que par le passé.

Le fait est que, depuis près de vingt ans maintenant, tous les gouvernements qui se sont succédé, de gauche comme de droite, sous la présidence de Mitterrand puis sous celle de Chirac, ont tous tenté de mettre en place, sous prétexte d'enrayer le chômage des jeunes, des systèmes consistant à les sous-payer, dans des emplois de toute façon précaires, tout en faisant miroiter des avantages aux patrons du secteur privé. On se souvient en particulier de la loi quinquennale pour l'emploi de Balladur, en 1993, qui a tenté d'imposer ses " contrats d'insertion professionnelle ", les CIP, qui autorisaient les patrons à payer les jeunes 80 % du Smic. Le gouvernement de l'époque en fut pour ses frais puisqu'il se heurta à une mobilisation importante de la jeunesse, notamment dans l'enseignement technique, qui l'obligea alors à remballer ses projets. Puis, il y eut toutes sortes de contrats comme, parmi les plus récents, les contrats emplois solidarité (CES), les contrats emplois consolidés (CEC) ou les contrats emplois-jeunes version Aubry, que le gouvernement Jospin avait présentés comme étant LA solution au problème du chômage des jeunes, mais qu'il n'a même pas été capable de transformer en emplois véritables pendant qu'il en avait le pouvoir.

En fait, lancés en octobre 1997, les contrats emplois-jeunes consistaient en un contrat de travail de cinq ans, rémunéré au Smic, devant permettre - avait dit Aubry - de créer 350 000 emplois dans le secteur public et autant dans le secteur privé, en l'espace de cinq ans. Fin avril 2001, alors que le chômage, et en particulier celui des jeunes, repartait à la hausse, 312 000 jeunes avaient été embauchés dans le secteur public (mais seulement 272 000 emplois créés) et pour ainsi dire aucun dans le secteur privé. Même les exonérations de charges sociales que le gouvernement faisait miroiter n'avaient pas suffi pour que les patrons créent des emplois-jeunes, sous contrat de cinq ans, dans leurs entreprises. Les contrats à durée déterminée, précaires, partiels, intérimaires, etc., assortis eux aussi de divers cadeaux fiscaux, leur paraissent d'évidence plus facilement exploitables.

Aujourd'hui, tout en mettant fin aux emplois-jeunes, Raffarin déclare qu'il ne laissera pas tomber les jeunes mais qu'il fera ce qu'il peut pour leur permettre de trouver un point de chute... dans la police, à la SNCF, à La Poste, etc. Ils n'auront aucune garantie cependant de ne pas être parmi ceux qui seront laissés sur le carreau, ou parmi ceux à qui il sera proposé un de ces " contrats d'insertion dans la vie sociale " (Civis) que le gouvernement veut mettre en place afin d'aider les jeunes, non à trouver un emploi stable, mais à " sortir des contrats emplois-jeunes "...

Mais surtout, avec ces " contrats jeunes en entreprise " créés par une loi d'août dernier, voilà une nouvelle mouture d'organisation de la précarité de l'emploi pour des centaines de milliers de jeunes travailleurs. Il s'agit de demander aux patrons, moyennant - encore et à nouveau - des exonérations de charges et autres avantages financiers éventuels, d'embaucher des jeunes travailleurs de 16 à 22 ans, non qualifiés, sans baccalauréat, à temps plein ou à temps partiel, pour une durée de trois ans. Les modalités du dispositif ne sont pas complètement arrêtées, mais il est déjà clair qu'il s'agit-là, comme d'habitude, bien moins de lutter contre le chômage des jeunes que de verser, plus ou moins ouvertement, de nouvelles subventions au patronat.

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