Aéroport d'Orly : La guerre des coûts fait un mort18/10/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/10/une1785.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Aéroport d'Orly : La guerre des coûts fait un mort

Le 17 septembre, un ouvrier laotien de 43 ans est mort sur la plate-forme d'Orly alors qu'il plaçait un avion qui venait d'atterrir. L'appareil, un ATR à hélice d'Air Littoral, débarquait des passagers avant de repartir vers une autre destination. Pour des raisons inconnues, car il était seul, notre camarade s'est approché trop près de l'une des hélices qui tournait encore. Il a été décapité.

Cet accident met en lumière l'aggravation scandaleuse des conditions de sécurité dans lesquelles doivent opérer les travailleurs des pistes. Et il soulève toute une série de problèmes.

Tout d'abord comment se fait-il que l'un des moteurs de l'appareil ait continué à fonctionner ? Une hélice qui tourne, c'est d'autant plus dangereux qu'on ne la voit pas, surtout lorsque la lumière est faible, ce qui était le cas lorsque l'accident s'est produit, vers 20h. D'ailleurs le moteur côté descente passagers avait été arrêté, preuve que les responsables y voient bien un danger. On nous a dit que le second moteur alimentait l'appareil en électricité. Mais il y a des groupes électrogènes mobiles spécialement prévus pour le faire. Non, la réalité est tout simplement qu'il faut toujours réduire les temps d'arrêt entre deux vols et qu'arrêter les moteurs fait perdre du temps !

Mais il y a plus. Malgré l'opacité qui entoure les circonstances de l'accident, nous savons que l'ouvrier décédé travaillait pour OSOA, une entreprise sous-traitante, et qu'il avait été envoyé faire ce travail en " bouche-trou ", probablement sans en connaître les dangers.

Le problème est plus général. Dans le passé l'assistance sur piste était effectuée par un personnel employé par ADP, société gestionnaire de l'aéroport, ou par les compagnies aériennes, personnel qui, parce qu'il était permanent, était rompu à tous les problèmes de sécurité. Mais au cours des dernières années, les choses ont changé. Toutes ces tâches, souvent dangereuses, ont été transférées peu à peu à des sous-traitants, afin de réduire au maximum les coûts.

Non seulement les responsabilités en matière de sécurité ont été diluées, mais également les moyens collectifs dont disposaient les travailleurs pour contrôler leurs conditions de travail et de sécurité. Du coup, des travailleurs précaires payés au rabais se sont retrouvés sur des postes dangereux, sans que leurs patrons jugent bon de leur assurer une formation de sécurité. C'est ainsi également que là où le travail se faisait avant à deux, on ne met plus qu'un seul travailleur.

Le plus ignoble dans toute cette affaire, c'est que, grâce à l'opacité de la sous-traitance, se cachent les responsables. Or, OSOA n'est autre qu'une filiale d'ADP, ce qui permet à la direction d'ADP de se défausser. Ce montage de filiales n'a d'autre but que de permettre à ADP d'employer en sous-main des travailleurs plus mal payés et plus exploités.

Le 17 septembre, l'un de nos camarades l'a payé de sa vie.

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