La Réunion, St-Benoît : Les conducteurs de "cachalots" font reculer leur direction11/10/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/10/une1784.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La Réunion, St-Benoît : Les conducteurs de "cachalots" font reculer leur direction

A la Réunion, pour la première fois depuis plus de 30 ans qu'existe la Société Agricole Nord Est, les travailleurs ont fait grève pour leurs revendications. Cette entreprise de 56 salariés, dont une vingtaine de permanents, est spécialisée dans l'acheminement de la canne à sucre depuis les plateformes où les planteurs la livrent jusqu'aux deux usines sucrières de l'Ile. A chaque campagne les 40 " cachalots ", gros poids lourds spécialement conçus pour cet usage, transportent un million de tonnes de canne.

Depuis un certain temps la direction avait multiplié les atteintes aux avantages acquis pour diminuer le coût de la main d'oeuvre. Des chauffeurs ont par exemple constaté sur leur paye d'août une perte d'environ 200 euros par rapport au même mois l'an passé. Les mesures prises par le nouveau directeur ont contribué à accroître le mécontentement. Ainsi, le contrat d'un ancien chauffeur saisonnier n'a pas été renouvelé. La prime en nature de 26 briques de lait par mois, qui existait depuis 25 ans et dont bénéficiaient encore quatre travailleurs, a été supprimée. Lors d'une réunion avec la direction les travailleurs ont demandé la garantie du renouvellement de leur contrat de saisonnier et la remise en place de la prime de lait. En réponse, on leur a servi des phrases creuses.

Réunis pour établir une liste en 14 points de leurs revendications, ils ont décidé d'un débrayage pour aller la porter au patron. Parmi les revendications, il y avait le renouvellement obligatoire des contrats de travail des saisonniers d'une année sur l'autre, le paiement des heures supplémentaires, l'augmentation de la prime de tâche de 300 à 450 euros, une prime de nuit de 20 euros, le paiement des deux premiers jours de travail en cas de panne prolongée de l'usine.

La grève a duré deux jours, les lundi 30 septembre et mardi 1er octobre. Dès le premier jour la plate-forme de Beaufonds saturée ne pouvait plus recevoir les cannes apportées par les petits planteurs. Bien qu'étant les premiers pénalisés, ces derniers, loin de se retourner contre les grévistes, ont bloqué une route avec une cinquantaine de tracteurs en signe de solidarité.

Toutes les manoeuvres de la direction pour tenter de diviser les grévistes n'ont pas abouti. De même, lorsque, la veille de la grève, la direction avait voulu faire sortir les cachalots en prévoyant de les faire conduire par les chauffeurs d'une autre entreprise, ceux-ci ont été interceptés par les grévistes et ramenés au garage.

Finalement, face à la détermination des grévistes et au soutien affirmé d'une partie des petits planteurs et d'autres travailleurs, la direction a dû céder. La prime de tâche augmente de 76 euros, la prime de nuit est fixée à 5,58 euros, les heures supplémentaires ainsi que les deux premiers jours en cas d'arrêt de l'usine seront payés, le prix des briques de lait sera versé aux travailleurs concernés. En moyenne cela représente une augmentation de 250 euros par mois. Les travailleurs ont voté la reprise.

Ce mouvement laissera des traces. Les travailleurs ont le sentiment d'avoir vécu collectivement des moments exceptionnels et ils se sentent assez forts pour envisager de remettre ça.

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