Nigéria : Un jugement barbare dans un monde barbare30/08/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/08/une1778.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Nigéria : Un jugement barbare dans un monde barbare

Le 19 août, dans le nord du Nigeria, une jeune femme, Amina Lawal, a été condamnée à mort par lapidation. Son " crime " est d'avoir donné naissance à un enfant hors mariage, ce qui est assimilé à l'adultère par la loi islamique, la charia. Rappelons que le Nigeria est un État fédéral, dans lequel douze États du nord du pays ont officiellement adopté la charia dans leur constitution depuis janvier 2000.

Dans ces derniers, l'amputation des voleurs, les coups de fouet pour " fornication " et la lapidation des femmes adultères font donc partie de la loi.

Déjà au début de l'année, un tribunal islamique avait condamné à mort une femme pour adultère. À l'époque, la sentence avait fini par être annulée pour un vice de procédure. La mobilisation internationale suscitée par la condamnation y avait sans doute été pour quelque chose, de même que l'attitude du gouvernement nigérian, qui préfère certainement annuler, sous un prétexte quelconque, de tels jugements, plutôt que d'avoir à se prononcer contre la charia. C'est en tous cas la position officielle de son président, Obasanjo, qui, tout en n'étant pas favorable à l'adoption de la charia par le gouvernement fédéral, ne condamne pas non plus son application dans les États du nord.

Actuellement, la récente condamnation d'Amina Lawal suscite l'indignation d'un grand nombre d'associations et de partis politiques à l'échelle internationale. Nous sommes, évidemment, solidaires de cette jeune femme, victime d'un obscurantisme d'un autre âge.

Cependant cette indignation, quand elle provient des gouvernements des pays riches, semble bien hypocrite. Une fois n'est pas coutume, toutes les capitales occidentales ont ainsi condamné le jugement avec la plus grande fermeté. Tant mieux s'ils s'indignent aujourd'hui, mais on remarquera qu'ils ont l'émoi à géométrie variable. Le Nigeria n'est en effet pas le seul État à utiliser la charia. L'Arabie Saoudite, par exemple, l'applique avec la plus grande rigueur : 79 personnes y ont ainsi été décapitées en 2001, la plupart au sabre et en public. Les amputations de la main droite pour les voleurs y sont fréquentes. Il est vrai que c'est un État " moderne " : la lapidation des femmes adultères ne se fait pas en jetant des pierres, ce sont des camions-bennes qui les déversent directement sur les condamnées. Mais l'Arabie Saoudite est un allié précieux des grandes puissances et de leurs banques. Comme quoi, le Moyen Âge et la barbarie ne les dérangent pas quand leurs intérêts sont bien servis.

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