Brésil - À l'approche des élections : Le Parti des Travailleurs à droite toute28/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1770.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil - À l'approche des élections : Le Parti des Travailleurs à droite toute

En octobre prochain, les Brésiliens vont élire leur président, les gouverneurs des 26 États et du district fédéral de Brasilia, les députés au Parlement national et aux parlements des États, ainsi qu'une partie des sénateurs. La campagne électorale, qui couve depuis plus d'un an, va entrer dans sa phase finale juste au moment où la crise économique semble s'approfondir.

Malgré les aides du Fonds monétaire international, la monnaie nationale est à son plus bas niveau. En chute de 18 % depuis janvier, le réal est à 2,8 pour un dollar. Les ventes d'automobiles ont reculé de 20 à 30 %. À l'indice du " risque-pays " qui, selon les experts, sert d'indicateur des incertitudes et des dangers que présente un investissement dans un pays donné, le Brésil vient immédiatement derrière l'Argentine, en pleine déconfiture économique.

Il n'en a pas fallu plus à certains journalistes pour attribuer ces difficultés au risque, fondé sur les indications que fournissent les sondages, que Lula, le candidat du Parti des Travailleurs, soit élu président. Car Lula est actuellement en tête dans ces sondages, avec 42 % des intentions de vote, loin devant tous ses concurrents déclarés. Le candidat de la droite José Serra, ancien ministre de la Santé et appuyé par l'actuel président Cardoso, ne dépasse pas 16 %.

Ce ne sont que des sondages et à plus de trois mois du vote. Autant dire que rien n'est prévisible. Quant aux gros possédants, brésiliens ou étrangers, qui assimileraient l'élection de Lula au " grand soir ", ils sont sans doute de plus en plus rares ou ils font semblant d'avoir peur. Et auraient-ils réellement peur que Lula et le PT ont tout fait pour les rassurer. Si, lors de ses premières campagnes des années 1980, Lula avait conservé un peu de son langage radical et de son image d'ancien ouvrier métallurgiste, porté par la mobilisation de la classe ouvrière, il a bien changé depuis.

Le " crapaud barbu " (c'était le surnom qu'on lui donnait) de naguère a adopté l'allure d'un politicien respectable, bien mis, la barbe bien taillée. En même temps qu'il domestiquait les courants de gauche de son parti, il a banni de son vocabulaire le mot " lutte " pour le remplacer par discours " responsable ". Il accepte le libre échange, les privatisations, la dette extérieure. Il courtise les militaires.

Certes, Lula continue de critiquer le " néolibéralisme " et l'ALCA (Aire de libre commerce des Amériques, patronnée par les Etats-Unis et prévue pour 2005). Mais c'est la seule manière de s'affirmer " de gauche " face à ses concurrents. La visite qu'il a faite en France pour soutenir la candidature de Jospin montre de quelle gauche il s'agit.

Enfin, dimanche 23 juin, lors de la Convention nationale du PT, ce parti a scellé son alliance avec un parti de droite, le Parti Libéral (PL). Du coup, le dirigeant du PL, José Alencar, sera le candidat à la vice-présidence que le PT soutiendra à l'élection présidentielle et ce sera donc un " ticket " entre Lula et ce riche industriel et sénateur ancien vice-président d'une confédération patronale. Le Parti Libéral présente aussi l'avantage de compter parmi ses députés Medeiros, le fondateur du syndicat Force Syndicale, de tradition de droite et opposé à la CUT, la Centrale Unique des Travailleurs, animée par les militants du PT.

Cette alliance accroîtra peut-être encore les chances de victoire de Lula, encore que ce ne soit pas certain. Mais ce choix est aussi de la part du PT une ouverture vers le grand patronat. Cela affirme encore plus nettement la politique qu'il mènera, s'il accède à la présidence : une politique au service des bourgeois brésiliens et de l'impérialisme. Et au moment où le Brésil semble en passe de plonger dans une crise analogue à celle de l'Argentine, il pourrait être très utile pour ceux-ci de disposer, à la présidence du pays, d'un homme issu de la gauche et pouvant se servir de son crédit dans les classes populaires pour leur faire accepter une politique d'austérité.

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