Un pays pauvre pillé par les multinationales14/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1768.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Un pays pauvre pillé par les multinationales

L'île de Madagascar, située dans l'océan Indien face au Mozambique, compte près de quinze millions d'habitants. Sa surface est légèrement supérieure à celle de la France. C'est l'un des pays les plus pauvres du monde. 75 % de la population vit en milieu rural dans un extrême dénuement et survit grâce à l'agriculture et à l'élevage. L'espérance de vie ne dépasse guère les 56 ans. La malnutrition et l'analphabétisme sont dominants.

Les catastrophes naturelles de ces dernières années, sécheresse, invasions de criquets, cyclones à répétition, ont été particulièrement dévastatrices. Elles ont aggravé les conditions de vie extrêmement précaires des populations paysannes. Les conséquences dramatiques de ces catastrophes ont été accentuées par la gestion désastreuse de la dictature de Didier Ratsiraka, qui a mis le pays en coupe réglée.

Mafias économiques et politiques, hiérarques militaires et gouverneurs de provinces, autant de petits potentats locaux qui ont développé le clientélisme, amassant des fortunes considérables en rançonnant les populations rurales et urbaines de l'île. La mafia des transporteurs, par exemple, bloque tout développement du réseau car elle seule possède les camions capables d'aller acheter et vendre des marchandises dans les parties les plus reculées et inaccessibles du pays, instituant ainsi un monopole commercial qui lui permet de s'enrichir au détriment de la population. L'île dispose d'un faible réseau routier en très mauvais état : 54 000 km de routes et de pistes dont 10 % seulement sont bitumés. Avec seulement 1 000 km de voies ferrées, le réseau ferroviaire est quasi inexistant.

L'économie entière de l'île est gangrenée par la corruption généralisée. L'essentiel des revenus du pays est accaparé par quarante familles qui font vivre 200 000 personnes, tandis qu'un autre million à peine bénéficie des retombées économiques. Plus de douze millions d'hommes et de femmes sont ainsi laissés de côté.

Les multinationales s'intéressent aux quelques secteurs de l'économie de Madagascar où elles peuvent réaliser de juteux profits. C'est donc dans ces quelques secteurs qu'elles ont investi. A l'instar de l'île Maurice toute proche, des zones franches se sont développées : filatures ou tissage du coton, entreprises de confection à Antananarivo, la capitale, mais aussi à Antsirabé ou à Mahajanga, autres villes de province. Les multinationales utilisent des travailleurs privés de tous droits sociaux, pour mieux les exploiter. En revanche, elles bénéficient d'avantages fiscaux considérables et de toutes les largesses de la part des autorités locales. Aujour-d'hui, ces compagnies profitent de la crise politique qui secoue l'île pour supprimer des emplois. 60 000 employés des zones franches se sont ainsi retrouvés au chômage technique et 20 000 ont été licenciés. Tous risquent de se retrouver à la rue si la crise continue. De grandes marques, comme Décathlon, Kiabi, viennent d'annoncer qu'elles annulaient leurs commandes à Madagascar. GAP, la plus grande chaîne vestimentaire américaine, s'apprête à faire de même.

Parallèlement, le FMI et la Banque mondiale ont favorisé les privatisations des grandes entreprises industrielles d'Etat depuis le début des années quatre-vingt-dix. Les gisements de mica, de bauxite, de charbon excitent quelques convoitises tout comme les industries liées à la production agricole (rizerie, huilerie, sucrerie, etc.). Sans oublier les pierres précieuses qui attirent toutes sortes d'aventuriers et de financiers douteux, mais aussi des représentants de grandes firmes, près à spolier la population malgache de ses richesses naturelles.

Partager