Un projet dont les pêcheurs ne veulent pas faire les frais07/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1767.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Un projet dont les pêcheurs ne veulent pas faire les frais

Sous prétexte de préserver les stocks de poissons dans les eaux de l'Union européenne, le plan que vient d'adopter la Commission européenne prévoit une réduction de 30 à 60 % des capacités de pêche, selon les régions et les types de pêche. Cela devrait se traduire par la démolition de 8 600 bateaux et la suppression de 28 000 emplois directs d'ici 2006.

Les instances européennes s'appuient sur des études faisant état de menaces pesant sur certaines espèces de poissons. Pêchés à trop grande échelle, les bancs de harengs, cabillauds, églefins et merlans ne pourraient plus se reproduire suffisamment pour assurer un renouvellement des stocks. Selon les espèces, les populations auraient diminué de 50 à 80 % en l'espace de vingt ans.

A cette annonce, les petits pêcheurs ont violemment protesté, en France mais également dans d'autres pays comme l'Espagne. En effet cette directive, qui se concrétiserait en France par la démolition de 962 bateaux, soit près de 11 % de la flotte, toucherait principalement la pêche artisanale. Au-delà des équipages, ce sont des dizaines de milliers d'emplois concernés par cette filière (dans les ports, les ateliers de réparation, les conserveries...) qui pourraient disparaître.

S'ils ne nient pas les problèmes liés à la diminution des stocks de poissons, les petits pêcheurs contestent le " scénario catastrophe " mis en avant pour justifier cette réforme. De plus, ils ne veulent pas être mis en accusation, et encore moins faire les frais de cette politique, alors que rien n'est dit à propos des rejets des industries polluantes ni des grandes unités de pêche industrielle, qui font pourtant bien plus de dégâts dans les océans que la pêche artisanale. Enfin ils dénoncent les mesures envisagées par les autorités européennes, notamment la suppression des aides qui jusque-là aidaient à la modernisation de la flotte, ce qui ne sera pas sans conséquences sur la sécurité des équipages.

Ils ont raison de ne pas vouloir faire les frais de cette politique qui condamne brutalement leur propre avenir. D'autres solutions seraient sans doute envisageables, comme la suspension temporaire de certaines pêches assortie d'une garantie de revenus pour les pêcheurs concernés, ou la transformation de certaines unités pour leur permettre de pêcher des espèces non menacées. Mais tout cela nécessiterait des moyens que ni l'Europe, ni les Etats nationaux ne veulent consacrer à ce problème. D'autant que, dans la concurrence qui oppose les petits pêcheurs qui se limitent à l'exploitation des ressources régionales et les grands armements capitalistes qui ont les moyens d'aller piller les ressources des mers lointaines, les dirigeants politiques nationaux et européens ont déjà choisi leur camp, celui des seconds.

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