Sport spectacle : Du ballon et des ronds07/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1767.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Divers

Sport spectacle : Du ballon et des ronds

Les droits de retransmission télé ont littéralement explosé pour le Mondial de football de cette année, avec 818 millions d'euros, contre seulement 84 millions d'euros pour la Coupe du Monde de 1998 en France, soit environ dix fois plus !

La société allemande KirchMedia a acheté ces droits à la Fifa (Fédération Internationale de Football) pour 1,7 milliard d'euros (avec ceux du futur Mondial de 2006 en Allemagne). Ensuite KirchMedia revend " ses " droits aux diverses télés et radios. Ainsi, après une âpre bataille, c'est Bouygues-TF1 qui a obtenu pour 168 millions l'exclusivité pour la France, distançant les autres prétendants France 2, Canal + et M6.

Le plus curieux c'est que KirchMedia a dû déposer son bilan récemment, début avril. Mais le richissime homme d'affaire Leo Kirch avait pris la précaution de transférer les droits en question à une filiale suisse KirchSport. Il peut ainsi faire faillite en Allemagne et gagner des millions en Suisse. C'est un " passage de ballon " financier très réussi.

Certains se demandent si les débuts calamiteux de l'équipe de France ne risquent pas de conduire à sa rapide élimination et donc à une baisse d'audience de TF1. La santé de la maison Bouygues passe aussi par celle de la cuisse de Zidane.

En ce qui concerne la radio, en France l'exclusivité a été acheté par RMC Info au groupe Kirch. Mais cette fois les radios concurrentes ont protesté contre ce monopole. Le plus cocasse étant que RMC, émettant depuis Monaco, ne pouvait toucher le nord de la France. RMC n'a pu y parvenir qu'en faisant accord avec plusieurs radios locales, les radios nationales refusant.

Au nom de la " liberté d'information ", Jean-Marie Cavada, président de Radio France, et les autres adversaires de RMC ont protesté contre la " marchandisation " de l'information. C'est vrai, même s'il y a belle lurette que " l'information " en matière de sport ne se délivre que moyennant finances. Et dans ce domaine ce sont les Jeux Olympiques qui détiennent le record avec 1,332 milliard d'euros à Sydney en 2000.

Il est loin le temps, s'il a vraiment existé, où le sport était affaire d'amateurs qui auraient considéré comme déshonorant de parler d'argent. Les unes après les autres, les équipes sont devenues professionnelles, le rugby bien après le foot. La plupart des événements sportifs, et surtout les plus grands (Mondial, JO, Tour de France, etc.), sont des entreprises de spectacles entre les mains de capitalistes qui cherchent le profit avant tout. De même qu'un spectacle est payant, ils trouvent parfaitement normal qu'une retransmission sportive le soit aussi, et pas de la simple " information " gratuite.

Alors, chacun le sait, le sport est gangrené par l'argent, et par voie de conséquence par le dopage. Il est vrai qu'on pourrait en dire tout autant du marché de l'art, de l'édition, des " majors " du disque, etc. Le profit et ses lois n'épargnent aucun secteur.

Quant à ceux qui ont vraiment du goût pour le sport, ils peuvent méditer ce constat de Claude Simonet, le président de la Fédération française de football : " Le football amateur se sent le parent pauvre... Nous venons de mettre en place un fonds d'aide à l'investissement, qui peut être abondé par les collectivités locales, pour permettre aux clubs de rénover leurs installations ". Merci Monsieur Simonet, pour ce beau geste (que les collectivités locales devront compléter), quand il déclare par ailleurs : " La Fédération française de football maintient un budget important : 120,5 millions d'euros pour 2002-2003 ".

Quant aux pays sous-développés, ils subissent dans ce domaine la même loi du plus fort que dans les autres. Un ancien joueur sénégalais constatait ainsi que " aujourd'hui, faute d'argent, nos meilleurs joueurs évoluent en France ". La Coupe d'Afrique des nations est la " foire aux bestiaux " où les dirigeants et recruteurs de clubs européens viennent dénicher de nouveaux talents à bas prix. Quant aux spectateurs africains, ils risquent d'être privés de la retransmission du Mondial, car TV Africa, qui a acheté l'exclusivité des droits, exige 56,8 millions d'euros de chaînes africaines qui la plupart du temps ne peuvent pas payer. Envoyer des bons joueurs à d'autres pays du monde est possible pour l'Afrique, mais les regarder ce n'est même pas assuré !

Le Mondial est vraiment une belle fête du foot... pardon, du fric !

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