Pourquoi voter, si ce n'est pas pour dire ce qu'on pense ?29/03/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/03/une1757.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Pourquoi voter, si ce n'est pas pour dire ce qu'on pense ?

Les porte-parole de la droite, qui s'inquiètent de voir qu'une fraction du monde du travail plus importante que par le passé pourrait cette fois-ci voter pour Arlette Laguiller, les porte-parole de la gauche gouvernementale, qui s'alarment en plus à l'idée de perdre des voix, affirment à qui mieux mieux que le vote en faveur de la candidate de Lutte Ouvrière serait stérile, parce qu'Arlette refusera de prendre parti au second tour. Pour la plupart de ces gens-là, comme pour la majorité des commentateurs, le premier tour est en fait une formalité inutile, le seul scrutin qu'ils trouvent important, c'est celui du deuxième tour.

Mais le premier tour de l'élection présidentielle sera au contraire le seul où les électeurs pourront se prononcer pour le candidat, pour la politique de leur choix. La loi électorale concoctée en son temps par de Gaulle, et que la gauche gouvernementale s'est bien gardée de modifier, ne permet qu'à deux candidats de rester en lice au second tour. Dans ces élections, si on en juge par les sondages actuellement publiés, cela signifie que tout se jouera au second tour entre deux candidats qui n'auront pas recueilli à eux deux la moitié des suffrages, les autres étant, qu'ils le veuillent ou pas, que leurs électeurs le souhaitent ou pas, automatiquement écartés.

C'est cela qu'ils appellent la " démocratie ". Et il faudrait que tous ceux, et ils sont nombreux, qui ne voient guère de différence entre la politique de la gauche gouvernementale et celle de la droite - parce que les uns et les autres mènent au fond la même politique au service des possédants, se livrent aux mêmes attaques contre la classe ouvrière - choisissent par qui ils préfèrent être mangés, et renoncent à dire au premier tour ce qu'ils pensent vraiment !

Le seul intérêt de ces élections, pour le monde du travail, c'est au contraire de dire clairement qu'il condamne non seulement la politique de la droite, mais aussi celle du gouvernement Jospin, et qu'il exige une autre politique. C'est de dire qu'il faut en finir avec les plans de licenciements à répétition, et qu'il faut interdire ceux-ci, interdire les délocalisations, sous peine de réquisition des entreprises.

C'est de dire qu'il faut rendre accessible à tous la comptabilité des entreprises, celle des banques ; c'est qu'il faut rendre publiques les fortunes privées des gros actionnaires et de leurs proches, celles des hommes politiques, afin que chacun puisse savoir d'où vient et où va l'argent, ce que font les entreprises des bénéfices énormes qu'elles encaissent. Et on ne peut évidemment pas se prononcer pour ce programme-là en votant pour ceux qui ont mené, comme Jospin, ou soutenu pendant cinq ans, comme Robert Hue, une politique diamétralement opposée, même si aujourd'hui certains font mine de trouver que le gouvernement n'était pas assez à gauche. Il n'y a pas d'autre moyen que de voter pour la seule candidate qui défende vraiment un programme conforme aux intérêts du monde du travail, c'est-à-dire pour Arlette Laguiller.

La presse au service du grand capital, les hommes politiques de la bourgeoisie, ne s'y trompent pas. On assiste ces derniers temps à une multiplication des médisances et des calomnies de toutes sortes contre Lutte Ouvrière et sa candidate, afin d'essayer de détourner l'électorat populaire du vote en faveur d'Arlette Laguiller. Les mêmes qui se disent si soucieux du bon " niveau " de la campagne partent du principe que plus le mensonge est répété, plus il a de chances d'être cru. C'est bien la preuve que la candidature d'Arlette Laguiller les gêne. Mais c'est aussi une raison de plus, pour les travailleurs, de la soutenir.

Car voter pour Arlette Laguiller, ce ne sera pas seulement la seule façon de dire qu'il est grand temps de donner un coup d'arrêt aux attaques contre le monde du travail. Mais ce sera aussi, si le nombre de suffrages qui se portent sur elle est important, le moyen de redonner confiance dans les capacités de lutte du monde du travail à tous ceux que la politique de la gauche gouvernementale a désorientés.

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