Quand Pie XII fermait les yeux... et laissait faire08/03/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/03/une1754.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Quand Pie XII fermait les yeux... et laissait faire

La récente sortie sur les écrans du dernier film de Costa-Gavras Amen a rouvert la polémique sur l'attitude de l'Eglise catholique et plus particulièrement de son chef de l'époque, Pie.Xll, face à l'extermination de millions de Juifs perpétrée par le régime nazi.

Les faits sont bien connus, même si les sommets de l'Eglise ne tiennent guère à ce qu'ils le soient. Au début des années soixante déjà, Rolf Hochhut, dans sa pièce de théâtre "Le Vicaire", dénonçait l'attitude de Pie XII, et des catholiques tentaient, par des manifestations comme à Paris en 1963, d'interrompre les représentations de cette pièce tandis que le pape Paul VI justifiait l'attitude de son prédécesseur.

C'est cette pièce de théâtre que Costa-Gavras a adaptée pour réaliser le film. Un jeune ingénieur protestant affecté dans les SS, responsable des services chargés des problèmes de désinfection, pourvoyeur des camps nazis en gaz toxiques, découvre la réalité. Dès lors il n'a de cesse d'alerter les autorités religieuses et surtout le pape dont il espère une condamnation ferme et publique des crimes antisémites nazis. Il ne trouvera que des portes closes et des oreilles sourdes, à l'exception d'un jeune prêtre qui, comme lui, ne pourra que constater l'indifférence, pour ne pas dire la connivence, de l'Eglise et du pape..

Aujourd'hui, des dizaines d'années plus tard l'Eglise fait "repentance". Le pape actuel à genoux demande pardon pour l'antisémitisme diffusé pendant des siècles par le clergé catholique parmi ses ouailles. Mais dans le même temps, les autorités du Vatican refusent toujours l'ouverture de leurs archives concernant la période de la Deuxième Guerre mondiale.

Encore jeune ecclésiastique, le futur Pie XII fut fortement impressionné par la révolution russe et la vague révolutionnaire qui secoua l'Allemagne après la Première Guerre mondiale. Représentant le Vatican à Munich, il se lia tout naturellement avec tout ce que cette ville pouvait compter comme officiers monarchistes et politiciens réactionnaires. Tous les moyens étaient alors bons pour endiguer le mouvement ouvrier et, à défaut de pouvoir l'écraser, isoler la révolution en Russie et l'étouffer.

En cela, Pie XII n'était pas différent des autres serviteurs de la bourgeoisie, dirigeants sociaux-démocrates inclus. Plus tard, comme dans tant d'autres de son espèce, il vit avec faveur le régime hitlérien, car il sauvegardait les intérêts des classes possédantes et était un bras armé contre l'URSS qui, aussi défigurée qu'elle fut par la dictature de Staline, n'en témoignait pas moins pour des millions de travailleurs d'un autre avenir possible que l'exploitation. Un peu plus tard encore, durant la guerre mondiale, le même Pie XII n'estima donc pas utile d'aliéner les bonnes relations de l'Eglise avec le régime nazi pour la défense des Juifs en voie d'extermination. D'ailleurs les chefs d'Etat des grands pays impérialistes dits démocratiques, pourtant en guerre avec Hitler, ne s'en soucièrent pas plus. Le sort de quelques millions de Juifs, et aussi de Tziganes, de Serbes... et au bout du compte de tous les peuples qui payèrent un si lourd tribut à la guerre, était porté au compte des pertes et profits de celle-ci, dans les deux camps... et donc aussi au Vatican.

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