Toulouse - L'avenir du pôle chimique : Tout le monde se revoie la patate chaude15/02/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/02/une1751.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Toulouse - L'avenir du pôle chimique : Tout le monde se revoie la patate chaude

Depuis l'explosion d'AZF qui a fait 31 morts, des milliers de blessés et des dizaines de milliers de sinistrés, le traumatisme dans les quartiers populaires touchés est palpable. Pour l'immense majorité, s'il est évident que, Total doit payer, il est aussi évident qu'il n'est plus question de continuer à vivre avec une bombe à retardement à côté de chez soi. C'est non seulement compréhensible, mais entièrement justifié. Il est aberrant qu'on ait laissé se développer la ville autour de ces usines d'autant plus dangereuses qu'elles sont dirigées en fonction du seul profit. Dans ces quartiers, mais aussi dans le reste de la ville, la question du maintien du "pôle chimique", comme on l'appelle, ne se pose même pas : il doit fermer.

La municipalité de droite, avec Douste Blazy, comme le Conseil général, dirigé par les socialistes, ont pris position pour la fermeture pure et simple du pôle chimique. Le Conseil régional, dirigé lui aussi par des socialistes, a pris une position plus nuancée : fermer AZF, d'accord, mais pour ce qui est de la SNPE, une entreprise à capitaux d'Etat, voisine d'AZF et qui produit notamment du phosgène, on parle plutôt de sécuriser les installations, voire de reconvertir certaines productions. Ce qui n'est guère rassurant, car rappelons que ce qui a explosé à AZF était réputé non dangereux.

De bonnes paroles pour les travailleurs concernés

Tous ont quelques mots pour les travailleurs concernés par la fermeture. Mais pas question pour eux d'envisager, pour compenser ces pertes d'emploi, la création d'autres emplois dans les services publics qui dépendent d'eux et des formations qui permettraient de tels reclassements. Ce ne sont pourtant pas les besoins qui manquent.

Pas question non plus pour eux d'envisager d'obliger Total à assumer sa part de responsabilités, en garantissant les salaires de tous les ouvriers du pôle chimique jusqu'à ce que de tels reclassements soient réalisés.

Certains sous-traitants ont déjà licencié ou mis en chômage leur personnel. Les salariés de la SNPE subissent le chômage technique. Et ceux d'AZF attendent un plan social prévoyant des préretraites au rabais ou des mutations avec perte de salaire. D'après les syndicats, il y a 1200 emplois directs sur le pôle chimique et 5000 emplois indirects.

Tout le monde se renvoie la patate chaude

Jospin a mis en place un calendrier pour trancher l'avenir du pôle chimique toulousain: "grand débat régional " à Toulouse, puis " grand débat national " à Paris. Trois mois après l'explosion, Jospin a déclaré tout et son contraire, et surtout qu'il était urgent... d'attendre encore.

Le rapporteur du débat national sur les risques industriels, Philippe Essig (ancien président de la SNCF), nommé par Jospin, vient de remettre ses conclusions. Il préconise notamment que ce soit au plan local, là où le risque existe, que la décision de la fermeture ou du maintien du pôle chimique soit prise : "L'Etat est trop loin et trop unificateur; la commune est trop petite ; c'est entre l'intercommunalité et la région que doit se situer le bon niveau de décision d'élus du suffrage universel, parfaitement éclairés par des débats où chacun apportera son avis". L'avantage pour Jospin serait évidemment de ne pas se mouiller dans une décision qui peut le gêner dans sa course vers l'Elysée.

Fermeture sous conditions

Pour la sécurité des installations, des ouvriers qui y travaillent comme des populations voisines, la solution c'est le contrôle rigoureux par les travailleurs qu'il faudrait instituer dans les faits, et pas que sur le papier. Pour imposer aux industriels de la chimie comme aux autres un tel contrôle, il faudrait un vrai rapport de forces et une lutte déterminée que les syndicats sont loin de vouloir mener.

Nous sommes pour la fermeture du pôle chimique. De telles usines ne peuvent pas rester au coeur des villes. Même sécurisées comme ils prétendent, le risque zéro n'existe pas, surtout quand c'est la recherche du profit qui préside à toutes les décisions. Total est responsable, mais les pouvoirs publics qui ont laissé faire le sont tout autant. Les uns et les autres doivent assumer.

Mais cette fermeture doit se faire à deux conditions.

D'abord que Douste Blazy, les pouvoirs publics locaux, et Jospin, qui seraient pour la fermeture du pôle chimique, créent dan l'agglomération les centaines d'emplois nécessaires pour reclasser tous les travailleurs, sans perte de salaire. Ce ne sont pas les besoins qui manquent, dans les transports publics, dans la santé, l'éducation. Et que Total finance, si nécessaire, ces créations d'emplois ou les formations nécessaires au reclassement.

Et ensuite, il n'est pas question d'accorder la moindre aide publique pour que Total aille s'installer ailleurs.

Alors, dans ces conditions, oui à la fermeture du pôle chimique.

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