TGV Est : Rentabilité sociale et rentabilité capitaliste ne riment pas ensemble08/02/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/02/une1750.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

TGV Est : Rentabilité sociale et rentabilité capitaliste ne riment pas ensemble

Lundi 28 janvier, sous les auspices de Gayssot, a eu lieu le lancement de la ligne TGV-Est, qui devrait être mise en service fin 2006. Cela fait près de vingt ans que ce projet existe sans avoir jusqu'alors connu la moindre concrétisation. C'est que la SNCF ne souhaitait pas jusque-là construire cette ligne à grande vitesse qu'elle juge peu rentable.

Et si le TGV-Est fut finalement mis sur rails en 1999, ce fut après que les collectivités locales ont été tenues de mettre la main aux portefeuilles. C'était d'ailleurs la première fois qu'elles étaient ainsi sollicitées pour la construction d'une ligne à grande vitesse. Dans le projet, elles doivent apporter 20 % du financement qui se monte à plus de trois milliards d'euros (20 milliards de francs). En fait, l'ensemble du projet est subventionné à 75 % par les pouvoirs publics, collectivités locales comprises. La SNCF et RFF (Réseau ferré de France) amenant quant à eux 25 % de l'investissement.

Autant dire que dans certaines régions fortement sollicitées financièrement, les conséquences sur les impôts locaux ne se sont pas fait attendre. Il en a été ainsi en Région lorraine, qui a annoncé en 1999 une hausse du taux d'imposition de 14 %.

La facture risque encore de s'alourdir car les surcoûts et les dépassements ont été systématiques lors de tous les chantiers TGV. Mais ces sommes dépensées ne seront pas perdues pour tout le monde, en tout cas pas pour Tractebel, filiale de la Lyonnaise des Eaux qui engrangera une bonne partie du gigantesque fromage que représente le chantier.

Préoccupantes aussi sont les modifications à attendre dans le nombre de dessertes des trains. Aucun engagement précis n'existe dans ce domaine. Si l'arrivée du TGV-Est mettra par exemple Reims à 45 minutes de Paris, le nombre d'arrêts journellement prévus dans cette ville, pourtant une des plus importantes du trajet, devrait être de sept contre onze aujourd'hui !

D'autres gares verront aussi le nombre de leurs dessertes diminuer, notamment celles de l'ancienne ligne Paris-Strasbourg. Pour les voyageurs à destination ou en partance des villes d'Épernay, de Châlons-en-Champagne ou de Bar-le-Duc, l'arrivée du TGV ne signifiera pas forcément un progrès s'il leur faut tout d'abord passer par Reims pour prendre une correspondance avec le TGV, d'autant qu'à Reims le nombre de dessertes à destination des autres grandes villes devrait être moindre.

Pour bien des villes moyennes, la SNCF ne prend aucun engagement précis et s'en remet aux Régions qui depuis le 1er janvier de cette année ont la responsabilité du transport régional. Ce sera donc aux Régions de créer des trains permettant des correspondances avec les TGV. Et les régions de l'Est y sont d'autant plus mal préparées que le matériel roulant dont elles disposent est particulièrement vieillissant. Les pannes se succèdent, entraînant des retards en cascade : il y a eu une dizaine de pannes sur Reims depuis le début de l'année. Il en est de même dans le département voisin de l'Aube où les trains sont aussi fréquemment en panne.

Pour que l'arrivée du TGV-Est soit vraiment un progrès pour tous les habitants des régions desservies, aucune des dessertes, auparavant assurées par les trains grandes lignes, ne devrait être supprimée. Mais visiblement ce ne sera pas le cas.

En fait, même avec des matériels performants comme le sont les TGV, rentabilité économique ne rime pas avec rentabilité sociale.

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