Police, gendarmerie... recul gouvernemental07/12/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/12/une-1742.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Police, gendarmerie... recul gouvernemental

Encouragés par les résultats obtenus par leurs collègues policiers, les gendarmes s'y sont mis à leur tour.

Dans une situation pire encore que les policiers, ils n'ont pas le droit de grève. Militaires, leur statut ne leur permet même pas de manifester publiquement. Pourtant, après qu'ils eurent tenté de se faire entendre au travers des protestations exprimées par leurs compagnes, ils ont franchi le pas, dans la région de Montpellier, en s'exprimant devant des caméras de télévision. En Aquitaine, ils ont entamé une grève du zèle, qui consiste à fermer les yeux sur de petites contraventions. Et les manifestations publiques se multiplient chaque jour. Pour l'instant, leur ministre de tutelle, celui de l'Armée, fait la sourde oreille.

Les policiers avaient su faire reculer leur "patron", le ministre de l'Intérieur Daniel Vaillant bien plus vite que n'ont pu le faire d'autres salariés de l'Etat qui attendent toujours qu'on leur accorde ce qu'ils demandent : des effectifs supplémentaires pour faire face convenablement à leurs tâches, et des salaires qui leur permettent de vivre convenablement. C'est le cas du personnel des hôpitaux publics, mais aussi d'autres fonctionnaires et des travailleurs des services publics.

La rapidité relative de ce recul gouvernemental s'explique. Car la police, mais aussi les gendarmes, exercent des fonctions qui sont utiles à l'ensemble de la collectivité, en assurant des tâches de sécurité nécessaires à la vie collective, pour un salaire et dans des conditions de travail, on a pu l'apprendre, qui ne valent guère mieux que ceux des salariés du bas de l'échelle. Mais elle accomplit une tâche particulière qui rend l'Etat plus sensible à ses exigences.

C'est qu'ils sont les gardiens de l'ordre, comme on dit. Cet ordre-là ne se limite pas à faire en sorte que le code de la route soit respecté, ou que les baigneurs puissent nager en sécurité. C'est aussi l'ordre social, qui consiste à maintenir la division entre ceux qui peuvent s'enrichir par l'exploitation du travail du plus grand nombre d'un côté, et ceux que leur travail, quand ils ont la chance d'en avoir encore un, laissent toujours démunis. Ils sont là pour empêcher que ceux d'en bas, quand ils n'acceptent plus le sort qu'on leur fait, quand ils refusent, par exemple, l'injustice des licenciements et se mettent en colère, bouleversent cet ordre. Cet ordre, la droite le défend ouvertement, elle le justifie comme immuable et naturel. Mais c'est finalement aussi ce que fait la gauche actuelle, celle de Jospin, Fabius, Guigou, Vaillant, qui eux aussi expliquent aux travailleurs que cet ordre est le seul possible et qu'au mieux, on ne peut que le réguler.

Certes, les syndicalistes policiers, en utilisant les opportunités de la situation, n'avaient pas en tête que la défense des intérêts matériels de ceux dont ils se disent les représentants. Sans doute, certains avaient-ils des arrière-pensées politiciennes.

Ceci dit, ils ont fait une démonstration qui peut être utile à l'ensemble du monde du travail, et montré que, pour se faire entendre de l'Etat-patron, il peut être efficace de manifester son mécontentement dans la rue.

Une leçon à retenir et qui peut servir à ces flics qui réclamaient, dans leurs manifestations, "du blé pour les poulets". Il faut souhaiter que, lorsqu'ils se trouveront face à des travailleurs qui réclameront la même chose qu'eux, qui défendront dans la rue ou dans la grève leurs emplois, au moment où on les enverra "casser du gréviste", ils s'en souviendront.

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