AOM-Air Liberté : Ce n'est pas aux salariés de payer03/08/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/08/une-1725.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

AOM-Air Liberté : Ce n'est pas aux salariés de payer

Le tribunal de commerce de Créteil a pris la décision, vendredi 27 juillet, de confier l'avenir d'AOM-Air Liberté à l'entreprise, nouvellement créée, Holco. A la tête de cette entreprise repreneuse se trouve un ancien pilote d'Air France, Jean-Charles Corbet. Ancien dirigeant du Syndicat National des Pilotes de Ligne (SNPL), il avait négocié avec la direction d'Air France un accord mettant fin à la grève des pilotes, en 1998 : les syndicats acceptaient un gel des salaires sur sept ans et une diminution des rémunérations en échange d'actions. Voilà qui préfigurait les mesures annoncées dans son plan actuel.

Le plan de reprise que certains journaux, mais aussi le ministre des Transports, Jean-Claude Gayssot, acclament, se traduit en fait par près de 1 800 suppressions d'emplois (sur les 4 500 restants), par une baisse de 10 % du salaire des pilotes et mécaniciens navigants (en échange d'actions de la future entreprise) et enfin, par le blocage pendant trois ans des salaires des personnels au sol. Voilà ce que certains osent appeler un sauvetage, en déclarant que " le pire a été évité "... en tout cas, pas pour les 1 800 salariés qui perdront leur emploi. Et en réalité, même la survie des 2 700 emplois restants n'est pas vraiment garantie, vu les problèmes financiers qui se profilent à très court terme.

Et tout cela, parce qu'à aucun moment, il n'a été réellement question de faire payer les responsables de cette situation, à savoir les deux groupes actionnaires : SwissAir d'une part et le groupe de Seillière, Marine-Wendel, d'autre part. SwissAir a annoncé qu'elle cèderait 1,3 milliard mais à la condition qu'AOM-Air Liberté renonce à toute action judiciaire à l'encontre des deux actionnaires. Quant au groupe de Seillière, il ne déboursera rien !

" Ce n'est pas cher payé " a déclaré Gayssot. C'est le moins que l'on puisse dire ! Mais ni lui en particulier ni le gouvernement Jospin en général n'ont fait le nécessaire pour qu'il en soit autrement. Les deux grands groupes ont cherché la bonne affaire en investissant des capitaux dans le groupe AOM-Air Liberté. Voyant que les bénéfices escomptés n'étaient pas au rendez-vous, ils se retirent, à moindres frais, pour réinvestir leurs capitaux dans des opérations qu'ils jugeront plus juteuses. Et tant pis si leur " aventure " entraîne la suppression de 1 800 emplois : ils s'en lavent les mains ! C'est ce que le gouvernement a totalement laissé faire. Le PDG de SwissAir peut dès lors, rassuré, tranquillement conclure : " Cette décision (celle du tribunal de Créteil) met un point final à notre stratégie de retrait ordonné sur le front de nos participations en France ".

En fait, il y a un point qui a poussé toutes ces parties à s'entendre rapidement, de Holco à SwissAir ou Marine-Wendel, en passant par le gouvernement, c'est la crainte que la colère des employés d'AOM-Air Liberté n'explose en plein été, au moment où le transport aérien est le centre de pas mal d'intérêts financiers (par exemple, le Club Méditerranée fait voyager 40 % de ses clients sur AOM-Air Liberté). Visiblement, Jean-Charles Corbet, le futur repreneur, a usé de son passé de dirigeant du SNPL pour se poser en garant de la " paix sociale ". Il a agité, devant les salariés, l'épouvantail d'une éventuelle reprise de l'entreprise par l'actuel PDG, Marc Rochet, qui est détesté pour toutes les suppressions d'emplois et les différentes remises en cause des statuts qu'il projetait. Mais en définitive, ce que le nouveau patron, Jean-Charles Corbet, apporte dans ses valises n'est pas bien différent.

Ce qu'il faut souhaiter, c'est que les salariés d'AOM-Air Liberté ne soient pas dupes, et qu'au contraire des prévisions de tous ceux qui leur ont tondu la laine sur le dos ou prévoient de le faire, ils se servent de tous les moyens de pression qui sont à leur disposition pour faire évoluer le rapport de force en leur faveur. Il n'y a qu'ainsi qu'ils pourront faire payer les responsables.

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