Bata - Moussey (Moselle) : Les travailleurs ne se laissent pas jeter27/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1724.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Bata - Moussey (Moselle) : Les travailleurs ne se laissent pas jeter

Après avoir appelé à voter la reprise du travail début juillet, l'intersyndicale (CFDT-CGT-CGC) a demandé le 20 juillet que soit libéré le stock de 450 000 paires de chaussures - le "trésor de guerre" - dont elle avait le contrôle depuis la fin de la grève. L'accord de reprise du travail, signé début juillet, comportait en effet un droit de regard de l'intersyndicale sur ce qui rentrait et sortait du dépôt de chaussures, situé dans l'enceinte de l'usine et qui alimente l'ensemble des magasins Bata avec des chaussures produites sur place et dans le monde entier. Depuis début juillet, l'activité était quasiment nulle, mais jeudi 19 des camions s'étaient présentés et les syndicalistes présents avaient aussitôt bloqué la porte principale.

L'administrateur judiciaire récemment nommé a demandé aux travailleurs de lever le blocage. Il a été relayé par l'intersyndicale qui a affirmé que "le fait de rendre le dépôt permettrait de pouvoir mieux négocier avec les administrateurs". Comme si les séances de négociations interminables depuis début juin avaient changé quoi que soit, si ce n'est d'avoir usé les nerfs et le moral de tous ! La direction et les pouvoirs publics n'ont pas été avares de réunions, tout en n'ayant rien à dire aux syndicats. Et l'intersyndicale s'est prêtée à ce jeu, laissant les travailleurs poireauter des heures durant, pendant que les palabres n'en finissaient pas avec le préfet, le sous-préfet, l'inspection du travail, les membres de la direction.

Des travailleurs sont intervenus contre la levée du blocage, mais l'ambiance s'est modifiée, surtout du fait de la maîtrise qui a changé d'attitude à 180°. Le jour du vote, reprenant les bonnes vieilles méthodes Bata, la responsable de l'atelier couture (dirigeante de la CGC) a réuni les ouvrières pour une "conférence" où elle a argumenté pour la levée du blocage. Ajouté à cela un certain découragement qui existe parmi les travailleurs et le fait que, les congés arrivant, la garde du dépôt aurait nécessité une mobilisation importante, une majorité de 367 salariés a voté pour la levée du blocage. En tout, 595 travailleurs (sur 875) ont participé au vote et 213 ont affirmé leur volonté de maintenir le blocage.

Vendredi 20 juillet, dernier jour avant les vacances du personnel de production, le dépôt a donc été libéré et, depuis, des camions arrivent tous les jours pour le vider.

En fait, cette décision est plus symbolique qu'autre chose, car le stock (estimé entre 40 et 50 millions de francs) n'avait de valeur que s'il avait été vendu. L'intersyndicale n'a jamais vraiment envisagé sérieusement de le faire et les travailleurs les plus en colère exprimaient, eux, plutôt l'envie d'y mettre le feu que de le mettre en vente.

Les 213 qui ont voté pour maintenir le blocage sont toujours aussi nombreux que les 217 qui avaient voté pour poursuivre la grève début juillet. Ce sont ces plus de 200 travailleurs qui ont été le fer de lance de la grève et des manifestations de juin. Ce sont eux qui pourront donner bien du fil à retordre à la direction, car ils n'ont pas envie de se faire jeter comme de vieilles godasses usagées.

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