Fonds spéciaux et magot caché : Abolition du secret commercial et bancaire!13/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1722.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Editorial

Fonds spéciaux et magot caché : Abolition du secret commercial et bancaire!

On nous amuse avec les dérisoires péripéties qui assombriraient le ciel de la cohabitation entre Jospin et Chirac. Chacun des camps sort de sa musette, à tour de rôle, une affaire nouvelle. La dernière en date - mais que les amateurs de feuilletons se rassurent, il y en aura forcément d'autres d'ici les élections - concerne Chirac et les voyages privés, pour lui et sa famille, qui étaient payés en puisant dans les fonds spéciaux de l'Etat. Des fonds dont les gouvernements successifs, quelle que soit leur couleur politique, peuvent disposer sans avoir à rendre de comptes sur la façon dont ils sont utilisés. Ce secret, concernant l'usage de près d'un demi-milliard de francs, a de quoi choquer les millions de femmes et d'hommes qui, eux, doivent compter chaque sou pour boucler leurs fins de mois, ne serait-ce que pour payer leurs frais de transports quotidiens, ou ceux liés à leurs vacances. Mais ce n'est que de la menue monnaie, comparé au reste.

En fait tout est opaque, rien n'est transparent dans le fonctionnement de l'Etat, dans celui de l'économie. Que sait-on, par exemple, des conditions dans lesquelles se négocient les marchés entre l'Etat et les grands groupes industriels privés? Que sait-on des prix que l'Alstom, Matra, Dassault, Thomson et quelques autres imposent à l'Etat - c'est-à-dire aux contribuables - pour les TGV, les équipements électroniques, les avions? Rien. Sauf quand, incidemment, un scandale éclate, levant un coin du voile qui nous permet d'apprendre l'existence d'un trafic dans lequel un ministre a joué un rôle dans une affaire de vente de frégates à Taïwan. Ou encore d'apprendre que le fils d'un président de la République, se disant de gauche, se trouve mêlé à un trafic d'armes, en même temps qu'un ex-ministre de l'Intérieur, franchement de droite.

Et que sait-on de ce que sont devenus les centaines de milliards que l'Etat verse au patronat, chaque année, sous des prétextes variés, et en particulier sous prétexte de favoriser l'emploi? Rien non plus. Sauf que cet argent est bien arrivé dans les poches des patrons. Mais ces patrons n'ont aucun compte à rendre sur l'utilisation de cet argent, encore moins à le rembourser, même lorsqu'il est évident que cet argent n'a pas servi à créer le moindre emploi ou même, pire, quand cela aboutit à en supprimer. C'est le cas pour Danone, Moulinex, Philips, quelques-uns des noms qui figurent dans le triste palmarès des licencieurs. En fait c'est le cas pour toutes les grosses entreprises de ce pays. On ne parle pas, à ce propos, de fonds spéciaux, mais ces fonds et leur utilisation sont tout aussi incontrôlables, et irrécupérables.

D'ailleurs un même secret entoure les combines des entreprises, et la fortune financière personnelle de leurs PDG. Seuls huit d'entre eux, sur les 40 sociétés qui figurent au CAC 40, l'indice boursier qui mesure les fluctuations de la Bourse, ont accepté de rendre public leur patrimoine financier, et encore très partiellement.

Malgré ce mystère, on sait que 33000 hauts dirigeants d'entreprises en France se partagent 45,3 milliards de revenus boursiers potentiels, ce qui fait 1,3 million par tête. A cela s'ajoutent leur salaire et d'autres avantages. Rien que ces 45,3 milliards représentent le salaire annuel de près de 400000 smicards. Mais de l'argent, il y en a bien plus que cela, si l'on ajoute les fortunes des gros actionnaires qui ont accumulé durant des années des profits réalisés en exploitant des millions de salariés.

Alors, que l'on ne vienne pas nous raconter qu'il n'y aurait pas de quoi maintenir à chacun son emploi, et un salaire qui permette à chacun de vivre normalement, et de faire vivre sa famille.

Tout cet argent qui profite à une minorité doit servir à la collectivité. Et pour commencer, il faut imposer l'abolition du secret des affaires, qu'elles soient d'Etat ou privées, et l'abolition du secret bancaire et commercial.

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