L'arnaque de la loi Aubry06/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1721.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

L'arnaque de la loi Aubry

L'enquête trimestrielle sur les salaires et le temps de travail, que vient de publier le ministère de l'Emploi, confirme ce que bien des travailleurs avaient pu vérifier par eux-mêmes, le fait que la modification du décompte du temps de travail rendue possible par la seconde loi Aubry a permis en pratique de limiter la baisse réelle du temps de travail.

En mettant en place les 35 heures dans leur entreprise, les patrons en ont en effet profité pour exclure du décompte les pauses, les jours fériés, les ponts, les jours de congés au-delà du minimum légal, bref tout ce qui était pris en compte auparavant quand l'horaire hebdomadaire de travail était de 39 heures.

"Lorsque les pauses sont déduites, elles représentent le plus souvent 20 à 30 minutes par jour, soit environ deux heures par semaine", constate le ministère. C'est ainsi que Peugeot a reporté hors du temps de travail 1 heure 45 de pauses hebdomadaires, rémunérées au tarif des heures de travail. Et les militants syndicaux, y compris les moins prévenus contre le gouvernement, constatent que, depuis la loi Aubry, presque tous les accords dans la métallurgie excluent les temps de pause du travail effectif.

La CGT a même saisi le tribunal de grande instance de Nanterre pour obtenir l'annulation globale de l'accord signé dans cette branche en avril 1999. La CGT conteste les "temps de pause diminués", en constatant qu'ils servent "d'outils de flexibilisation du travail à la direction". Une action similaire a d'ailleurs été menée contre Peugeot.

Il y a aussi tous les patrons qui ont déplacé les temps de pause de façon, là encore, à les réduire.

Et toutes ces manipulations ont eu lieu avec d'autant plus de facilité qu'en procédant de la sorte, les patrons ne perdaient pas leurs droits à bénéficier des allégements de cotisations sociales, une mesure d'accompagnement qui revenait pour le gouvernement à céder à une revendication permanente du patronat français qui pleure continuellement pour obtenir de nouvelles baisses des charges.

Selon le ministère si, sur le papier, le passage de 39 à 35 heures représente une réduction du temps de travail de 11,4 %, en pratique, celle- ci n'est que de 7,7 % et d'encore moins pour les cadres (5,3 %).

Un autre rapport, édité par le Commissariat général du Plan et qui concerne également la réduction du temps de travail, constate de son côté que celle-ci a engendré une intensification du travail et des effets néfastes sur la santé. Et cela touche au premier chef les ouvriers et les employés, qui restent la grande majorité (71,8 %) des travailleurs concernés par le dispositif des 35 heures.

Alors quand, Seillière en tête, le patronat rompt des lances avec le gouvernement contre la loi des 35 heures, c'est un bel exercice d'hypocrisie, qui a surtout pour but de préparer le terrain à de nouveaux avantages que les chefs d'entreprise attendent d'un gouvernement toujours prompt à leur céder.

Les porte-parole du Medef sont les premiers à savoir qu ils pourraient dire un grand merci à Jospin et Aubry, si on ne leur avait pas appris par ailleurs qu'il faut se garder de toute familiarité avec ses petits commis.

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