Haïti : Le retour d'Aristide16/02/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/02/une-1701.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Haïti : Le retour d'Aristide

Le 7 février dernier, Jean-Bertrand Aristide a officiellement pris ses fonctions de président d'Haïti.

Dix ans après son élection triomphale qui avait suscité un immense espoir de changement, avant qu'un coup d'Etat ne le chasse du pouvoir quelques mois plus tard, Aristide revient donc à la tête de l'Etat mais sur de tout autres bases. Car même s'il subsiste encore des illusions au sein de la population pauvre sur ce qu'Aristide et les politiciens de son clan (La Famille Lavalasse) peuvent lui apporter, sa candidature n'a pas soulevé le même enthousiasme.

D'ailleurs, à la différence de celles de 1991 qui avaient vu la population se mobiliser massivement, les élections à la présidence qui se sont déroulées le 26 novembre dernier ont été marquées par un fort taux d'abstention, y compris dans les quartiers les plus pauvres considérés comme ses bastions.

Tant dans leur préparation que dans leur déroulement, ces élections, comme les législatives qui les avaient précédées le 21 mai, ont été marquées par de nombreuses fraudes et des violences. Elles ont d'ailleurs été contestées et boycottées par plusieurs partis d'opposition qui ont dénoncé "un coup d'Etat électoral visant à instaurer une nouvelle dictature". C'est donc sans surprise qu'Aristide est sorti vainqueur, non seulement parce qu'il n'avait pas de concurrent sérieux, mais aussi parce qu'il avait pris soin de placer tous les bureaux de vote sous le contrôle de gens à sa solde, qui n'hésitaient pas à chasser par des menaces physiques les observateurs des autres partis.

De leur côté, les grandes puissances, les Etats-Unis et la France en particulier, après s'être vantées d'avoir contribué à "la restauration de la démocratie en Haïti", se sont démarquées de cette mascarade électorale. Du coup, les Etats-Unis ont décidé de geler 500 millions de dollars d'aides promis depuis 1997, tandis que l'Europe attend, pour débloquer 70 millions d'euros, que le nouveau pouvoir s'engage à "respecter la démocratie et les droits de l'homme".

Reste que la population pauvre est la première à faire les frais d'une situation économique déplorable. Elle le paie par un chômage massif, un délabrement complet du peu de services publics qui existaient dans le pays, et des hausses de prix qui ont rendu les produits de première nécessité inabordables pour la grande majorité.

Et il n'y a aucune raison qu'Aristide apporte un quelconque changement à cette situation. Ni lui, ni les politiciens qui l'entourent ne parlent de s'en prendre à ceux qui détiennent les richesses, qui spéculent sur les produits de première nécessité, qui pillent les caisses de l'Etat et des services publics, afin d'améliorer le sort du plus grand nombre, pas plus qu'ils n'ont promis qu'une fois élus ils feraient relever le salaire minimum ou qu'ils soulageraient l'extrême misère qui sévit dans les villes comme dans les campagnes.

En revanche, ils ont mis en place un système d'encadrement des quartiers pauvres par des bandes de voyous (les "chimères"), qui font régner la terreur, rançonnent, agressent et assassinent, tout en bénéficiant de la bienveillance de la police. Des bandes qui pourraient très bien servir contre cette population pauvre, si elle se révoltait contre le sort qui lui est fait.

Partager