Le ministre Pierret chez Chausson : Une visite incongrue01/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1690.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Le ministre Pierret chez Chausson : Une visite incongrue

Le secrétaire d'État à l'Industrie, Christian Pierret, s'est rendu jeudi 23 novembre sur le site de l'ancienne usine Chausson de Creil pour faire en grande pompe l'inauguration de ce pôle, exemplaire à ses yeux, de réindustrialisation.

Seulement, le désastre industriel et social que les gouvernements de gauche et de droite ont supervisé, chez Chausson en général et à Creil en particulier, est encore dans les mémoires.

L'usine de Chausson-Creil a fermé le 1er avril 1996 à la suite d'un long conflit de plus de trois ans. Après une bataille âpre, des plans de licenciements successifs (il y avait 5 000 personnes dans cette usine dans les années 1980, et encore 2 500 début 1993) les travailleurs de Creil, aux côtés de leurs camarades de Gennevilliers, ont imposé à Renault-Peugeot et au gouvernement des accords qui devaient garantir qu'aucun salarié de Chausson ne se retrouverait à l'ANPE.

En plus des diverses mesures sociales arrachées par la lutte, le gouvernement avait annoncé « un plan exceptionnel » de réindustrialisation sur Creil, avec à l'appui des dizaines de millions de francs d'aides. L'Etat, en liaison avec le district de Creil, qui regroupe les quatre communes du secteur, a mis sur pied dans l'ancienne usine un site d'accueil d'entreprises. Pour cela il a fait appel en plus à l'aide de la région et du département. De plus l'ancienne usine a été classée en zone franche, ce qui permet aux arrivants d'échapper aux charges, impôts et taxes.

Un accord écrit garantissait qu'au moins 150 ex-salariés de Chausson y seraient reclassés. Aujourd'hui le ministre se félicite des 650 emplois qui y sont. Seulement, chacun reconnaît par ailleurs que l'essentiel des emplois ont simplement été transférés sur ce site pour bénéficier des avantages divers, avec en plus des aménagements payés par les fonds publics. Quant aux engagements pour les anciens Chausson... seules dix personnes travaillent au total sur le site sur les 150 promis. Or sur les 2 500 qui travaillaient encore là en 1993, il reste 85 personnes qui sont encore à l'ANPE. Et l'Etat a renouvelé il y a quelques mois ses engagements initiaux.

Par ailleurs, Christian Pierret au nom du gouvernement et de l'Etat est garant de la réalisation des accords d'octobre 1995, qui faisaient que Renault garantissait l'avenir des personnels. Les deux usines conservées par Renault dans le cadre de ce plan, l'une à Gennevilliers (ETG) et une usine de câblage à Creil (SCO), vont fermer. Cela a donné lieu à des mois de luttes des travailleurs de Gennevilliers pour obtenir enfin le respect des engagements initiaux, qui ont été étendus aux 150 salariés de SCO-Creil. Seulement, à Creil en particulier, Renault encore une fois ne respecte pas ses engagements, aussi bien sur les reclassements que sur l'avenir des personnes nées en 1951 et plus, qu'ils devaient accompagner jusqu'à la retraite.

Cette situation a été dénoncée publiquement par les organisations syndicales de Chausson qui assurent encore aujourd'hui le suivi de l'application des accords de 1995 et de ceux qui ont suivi, ainsi que par celles de Renault-SCO. Du coup le représentant du ministre s'est cru obligé de déclarer aux syndicats qu'il a reçus que le gouvernement rappellerait par écrit qu'il entend demander à Renault de respecter la lettre et l'esprit des accords passés. Les travailleurs verront ce qu'il en est.

En tout cas devant le culot de cette visite pour une gloriole mal placée, même la télévision régionale qui a couvert cette visite a mis l'accent sur les engagements non tenus de l'Etat, en rappelant ce qui existait là auparavant, avant que les méfaits perpétrés par Renault et Peugeot, avec l'appui des gouvernements, ne viennent faire disparaître des milliers d'emplois et plonger des familles dans la détresse.

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