Israël : Dans les territoires occupés, une politique coloniale01/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1690.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Israël : Dans les territoires occupés, une politique coloniale

Alors que chaque jour la répression engagée par l'armée israélienne contre la révolte du peuple palestinien apporte sont lot de victimes, le gouvernement Barak continue sa politique de faits accomplis, tant dans le domaine législatif que dans celui de l'extension des colonies. Le gouvernement israélien a ainsi décidé lundi 27 novembre que dorénavant, toutes modifications concernant les limites municipales actuelles de Jérusalem doivent être adoptées par une majorité absolue des députés. Cette nouvelle loi a évidemment pour but de rendre à l'avenir plus difficile encore la possibilité d'un accord israélo-palestinien sur la ville.

Les limites municipales de Jérusalem n'ont aujourd'hui rien à voir avec la ville elle-même. C'est en fait une vaste zone, appelée aussi le grand-Jérusalem, qui englobe de nombreuses colonies juives dont les plus connues sont Har Homa, Ramot Allon ou encore Gilo, et des villes et quartiers palestiniens dont Jérusalem-Est. Actuellement, l'ensemble de la zone s'étend sur 20 kilomètres du nord au sud et sur plus de 10 kilomètres d'ouest en est. Mais cette superficie déjà très importante, vu l'étroitesse de la Cisjordanie, devrait s'étendre encore, voire doubler avec l'adjonction de la principale colonie juive de Cisjordanie : Maale Adumim, située quelques kilomètres à l'est de l'actuelle municipalité de Jérusalem.

Cette colonie qui compte aujourd'hui un peu moins de 30 000 habitants a commencé à être édifiée à la fin de l'année 1975, sous le premier gouvernement dirigé par le travailliste Izthak Rabin. En juillet 1977, quelques mois après la victoire de la droite, le gouvernement de Begin classait Maale Adumim comme zone de développement prioritaire, ce qui permit à la colonie de recevoir encore plus de subventions au logement, plus de réductions d'impôts et plus de prêts à faible intérêt. En 1992, Maale Adumim fut la première colonie à obtenir le statut de ville.

Bâtie sur des terres prises aux Palestiniens et aux tribus bédouines qui furent expulsées, la nouvelle ville bénéficia en 1995 un plan d'expansion mis au point par le second gouvernement Rabin. Et ainsi, avec une population assez faible, la colonie s'étendit sur 53 kilomètres carrés, soit une superficie plus vaste que Tel Aviv et équivalant à la moitié de Paris. A terme l'objectif serait bien sûr d'intégrer Maale Adumim à Jérusalem, enserrant ainsi la Jérusalem-Est arabe dans un véritable étau.

D'ailleurs, à ce propos, Barak a été très clair. Lors d'une visite à Maale Adumim il a promis : « Chaque maison que vous avez construite ici est une partie de l'Etat d'Israël. Pour toujours [...] Nous continuerons à développer et à renforcer Maale Adumim ». Et en fin de discours Barak confirmait que pour lui l'annexion était déjà un fait accompli : « Je dis que vous être une partie de Jérusalem ». S'il se poursuit, le plan d'expansion empêchera une liaison directe entre le nord et le sud de la Cisjordanie, en particulier entre les villes de Ramallah et Bethleem. Les Palestiniens ne pourront se rendre d'une ville à l'autre qu'en passant par des territoires sous contrôle israélien, ou alors en faisant un vaste détour par l'est.

En septembre dernier, quelque temps avant que ne débute la seconde Intifada, le mouvement israélien « La Paix maintenant » publiait un rapport montrant que durant les trois premiers mois du gouvernement Barak, on avait autorisé l'édification de 2 600 nouveaux logements en Cisjordanie. La majorité d'entre eux devraient être construits dans la région de Jérusalem, en particulier à Maale Adumim qui, aux dires du ministre du Logement, doit être renforcée si le gouvernement veut sauvegarder Jérusalem.

C'est ainsi que les gouvernements israéliens, qu'ils soient de droite ou de gauche, ont développé leurs colonies, ce qui a abouti à une politique d'encerclement systématique de la population palestinienne. En développant les colonies, en les reliant entre elles, en prenant toutes les terres qu'il jugent nécessaires, en s'octroyant le contrôle de l'eau, si vitale dans cette région, les gouvernements israéliens mènent une politique en tous points identique à celle que menèrent les puissances coloniales européennes à la fin du siècle dernier et dans la première moitié de celui-ci.

Tout se ressemble, jusqu'au mépris envers les populations, jusqu'à l'établissement d'un système de ségrégation et de discrimination dans lequel deux populations vivant dans la même région sont régies par des systèmes de lois différents.

Les Palestiniens sont soumis à la loi militaire et jugés le plus souvent par des cours militaires, tandis que les Israéliens qui commettent les mêmes délits sont passibles de cours civiles. Les colons jouissent des mêmes droits que les Israéliens vivant en Israël, tandis que les Palestiniens vivant à quelques centaines de mètres des colonies ont eux des droits très limités dans tous les domaines. Et lorsqu'ils se revoltent, c'est la mitraille.

Il y a quelque temps, au sud de l'Afrique, on appelait un tel système l'apartheid : un régime qui pour la majorité de la population était intenable ; et qui n'a pas tenu.

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